Contribution du Medef aux Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche
Le gouvernement a lancé le 11 juillet dernier, les Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche qui mettent en débat les sujets de la réussite de tous les étudiants, d’une nouvelle ambition pour la recherche et l'enseignement supérieur (rôle dans la société et dans l'économie, dans la transition écologique, dans le rayonnement international de notre pays) et de la révision de la gouvernance des établissements, des politiques de sites et de réseaux.
Le MEDEF présente des propositions, pragmatiques et indispensables, pour répondre aux enjeux auxquels est confronté l’enseignement supérieur français. En effet, l’essor de nouvelles puissances et la massification de l’enseignement supérieur au niveau mondial accentuent la nécessité de faire émerger des universités d’excellence, capables d’attirer les meilleurs talents au service de notre pays et de nos entreprises, mais aussi de soutenir l’effort en matière de politique de recherche et d’innovation. >> Télécharger la contribution du Medef.
Extraits de la contribution du Medef.
L’enseignement supérieur et la recherche sont vitaux pour l’avenir de la France et de l’Europe.
D’abord, le rayonnement culturel d’un pays, son prestige et donc son influence dans le monde sont directement liés à son investissement et sa réussite dans les valeurs que l’Occident a placées depuis le début de l’ère moderne au sommet de la civilisation, au premier rang desquelles figurent la science, la connaissance et la recherche de la vérité. Un pays qui investit peu ou pas assez dans l’enseignement supérieur et la recherche perd rapidement de son attractivité et s’affaisse culturellement.
Ensuite, la théorie économique, et notamment les modèles de croissance endogène, ont montré que l’enseignement supérieur et la recherche étaient l’un des principaux facteurs de croissance, qui permet de contourner le problème des rendements décroissants: le capital n’est pas condamné à « s’user »justement parce qu’il est renouvelé par la recherche qui débouche sur l’innovation technique.
Enseignement supérieur comme recherche sont donc non seulement indispensables au prestige et au rayonnement de notre pays, mais également à sa croissance, et donc à son enrichissement au profit de tous. Or, force est de constater qu’en 2012, notre pays n’est pas à la hauteur de son histoire et de son rang.
D’un point de vue quantitatif, il est malmené par les nouvelles puissances et la massification de l’enseignement supérieur au niveau mondial. La Chine diplôme au sein de son enseignement supérieur aujourd’hui deux fois plus d’étudiants que les Etats-Unis et dix fois plus que la France ou l’Allemagne. La population mondiale des étudiants avoisine les 200 millions quand elle était de 10 millions dans les années 50.
D’un point de vue qualitatif, il n’appartient pas au peloton de tête, selon le classement de Shanghai, des pays de l’OCDE. Cette situation doit être redressée d’urgence, faute de quoi le décrochage, dans ce domaine comme dans d’autres, sera irréversible. p.3
Le Medef est donc particulièrement attaché aux principes suivants:
• les étudiants doivent pouvoir choisir leur formation en connaissance de cause: l’information sur le taux d’insertion de la formation envisagée doit être obligatoire et préalable au choix d’orientation de même que le taux de réussite au diplôme selon le baccalauréat d’origine;
• la formation initiale doit s’organiser pour répondre à la diversité des talents et des intelligences et proposer des solutions d’apprentissage adaptées pour permettre à tous les potentiels de se révéler;
• la formation initiale doit être davantage articulée à la formation continue pour construire des parcours de formation diplômant, incluant les premières années de la vie professionnelle;
• les formations professionnalisantes doivent faire l’objet d’une co-construction par les représentants des secteurs d’activité et la communauté éducative qu’il s’agisse de l’élaboration des diplômes, des formations en alternance mais aussi de l’ouverture des équipes pédagogiques aux professionnels;
• les établissements universitaires doivent bénéficier d’une grande autonomie pour s’adapter à leur environnement compétitif;
• l’attractivité internationale et la mobilité des étudiants doivent être considérées comme une priorité. p.5
Propositions sur l’Enseignement supérieur
POUR UNE UNIVERSITÉ DE LA DIVERSITÉ - DES VOIES DE RÉUSSITE
La réussite des étudiants se traduit à la fois par un enrichissement et un épanouissement intellectuels, et par une insertion sans heurts sur le marché du travail.
Seul un renforcement des relations entre les entreprises et les établissements d’enseignement supérieur, la construction d’outils partagés et le développement de la professionnalisation des cursus permettent non seulement de soutenir l’attractivité des filières et de préparer la délicate transition, pour les étudiants, entre la formation et l’emploi.
1 - Pour chaque élève ou étudiant, tout choix d’orientation doit être précédé obligatoirement d’une information sur le taux d’insertion professionnelle du diplôme choisi.
Les échecs ou abandons de cursus sont trop nombreux à l’université. 38% seulement des 230 000 nouveaux entrants dans un cursus de licence universitaire obtiennent leur diplôme de licence après 3, 4 ou 5 ans. 6% d’entre eux arrêtent leurs études en L1, 52% poursuivent en 2ème année et 19% sont réorientés en STS ou IUT. En ce qui concerne les bacheliers professionnels, ils sont de plus en plus nombreux chaque année à s’inscrire en licence, 24% décrochent en 1ère année et seuls 18% poursuivent en L2 mais seulement 6% en sortent diplômés. Par ailleurs, 75% des étudiants diplômés de licence générale sont en emploi en 2010
2 - L’Université doit permettre une diversité des voies de réussite
La mise en oeuvre d’un système de formation initiale performant, permettant la réussite du plus grand nombre d’étudiants, exige une politique nationale de formation et de certification lisible et de qualité. Il s’appuie sur un lien fort entre le système de formation et le monde économique, en prenant en compte les besoins des entreprises et plus largement ceux du marché de l’emploi.
3 - Les échanges universitaires internationaux doivent être développés
Au Moyen-Âge, les étudiants traversaient l’Europe pour étudier à Bologne, Salamanque, Paris, Oxford… Au fond, à notre époque, la compétition pour le savoir n’a fait que s’élargir à d’autres continents et s’intensifier, mais l’enjeu reste le même: rayonner culturellement, attirer les étudiants et les professeurs les plus doués grâce à quelques centres d’excellence mondiale.
4 - L’adéquation entre les formations du cycle licence avec les objectifs qualitatifs du LMD (processus de Bologne) doit être rapidement réalisée
Les instituts universitaires de technologie (IUT) doivent pleinement remplir leur mission d’établissement de formations technologiques de haut niveau. Créés pour les besoins du développement économique, social et territorial, il y a presque 50 ans, les IUT ont fait preuve de leur efficacité grâce à leur autonomie de gestion, des liens forts avec les entreprises, la nature de leur pédagogie très structurée, différente dans ses modalités de celle des autres composantes de l’université, la vitalité de leur réseau et leur capacité d’innovation notamment en matière de professionnalisation. La création des licences professionnelles bien articulées avec le DUT a complété le dispositif et conduit leurs étudiants vers des emplois qualifiés de niveau « L ». Ce mouvement doit se poursuivre pour adapter les cursus au standard LMD et augmenter ainsi sa visibilité.
5 - L’offre de formation doit être adaptée aux standards internationaux et aux reprises d’études différées.
Le drame de l’université française est d’en être venu, contrairement à beaucoup de ses homologues étrangers, à délivrer des diplômes qui ne garantissent en rien les compétences et les savoirs de ceux qui les ont obtenus.
6 - Encourager le développement, en cours de carrière, des travaux de recherche en doctorat des hauts potentiels des entreprises
Il faut en finir avec l’idée bien française qu’un diplôme initial détermine toute une vie professionnelle. Les carrières ne sont plus linéaires et la sécurisation des parcours professionnels doit être aussi conçue par l’étudiant comme un processus d’investissement personnel pour l’avenir.
LE MEDEF accompagnera la réflexion des universités sur la préparation d’un doctorat en cours de vie professionnelle.
7 - Développer l’alternance dans le supérieur et dynamiser la politique de formation continue des établissements d’enseignement supérieur
Aujourd’hui, les apprentis dans l’enseignement supérieur représentent près de 25% de l’effectif total des apprentis soit plus de 110 000. En permettant souvent aux enfants dont les parents ont peu de moyens financiers de poursuivre leurs études, l’apprentissage dans l’enseignement supérieur joue une fonction d’ascenseur social indispensable à notre société. Le système d’aides publiques, et notamment l’indemnité compensatrice forfaitaire, pourrait évoluer en prenant davantage en compte cet aspect de la réalité.
ASSOCIER LES ENTREPRISES AU MONDE UNIVERSITAIRE POUR ASSURER L’EMPLOYABILITÉ DES ÉTUDIANTS ET LEUR ADAPTATION AU MARCHÉ DU TRAVAIL
Les entreprises sont à la disposition des universitaires pour participer au niveau national ou territorial à la définition des formations et des diplômes nationaux, mais aussi pour impulser des initiatives qui permettent d’améliorer la professionnalisation et le décloisonnement des filières de formation.
1 - Instaurer des conseils de perfectionnement des formations associant professionnels et enseignants
Le MEDEF souhaite que se généralisent (au minimum par mention de diplôme) des conseils de perfectionnement des licences générales, comme cela est parfois pratiqué dans des formations de master, pour les licences professionnelles ou encore dans formations par apprentissage. Ces conseils de perfectionnement ont pour objectif d’apprécier la pertinence du projet de formation au regard de l’évolution des compétences et des métiers. Les professionnels des secteurs d’activités visés par le diplôme et les enseignants pourront s’appuyer sur les travaux des observatoires des branches professionnelles mais aussi sur les données du futur observatoire « Tendances emploi-compétences » que le MEDEF construit actuellement, en amont de la création ou de la demande de réhabilitation des maquettes de formation.
2 - Créer une instance de dialogue et de prospective entre le monde éducatif et les branches professionnelles.
Les pouvoirs publics et les branches professionnelles ne disposent d’aucun lieu de dialogue pour apprécier l’adéquation entre les diplômes et l’évolution des secteurs d’activité, des métiers et des compétences. Il faut pouvoir anticiper les besoins du marché du travail y compris au niveau européen et international mais aussi accompagner l’émergence de nouveaux métiers. Au moins une dizaine de ministères délivrent des diplômes et certifications aujourd’hui et il convient de coordonner l’offre globale de la formation autant que de faciliter la lisibilité de l’offre.
3 - Généraliser les filières entrepreneuriat dans l’enseignement supérieur
Le MEDEF souhaite que le développement de l’esprit d’entreprendre chez tous les étudiants participe plus clairement aux objectifs et aux missions de l’enseignement supérieur. Le MEDEF accompagne activement le développement des pôles entrepreneuriat étudiants (PEE) depuis 2010 et la généralisation des modules de sensibilisation des étudiants. Le MEDEF a ainsi participé à la rédaction du référentiel de compétences entrepreneuriat et esprit d’entreprendre pour les étudiants inscrits dans les cycles licence, master et doctorat...
Des spécialités de diplômes baptisées « Entrepreneurs » doivent pouvoir être proposées au bénéfice des étudiants qui souhaitent être accompagnés dans un projet de création d’entreprise.
RENFORCER L’AUTONOMIE DE DÉCISION DES UNIVERSITÉS POUR LEUR PERMETTRE DE S’ADAPTER AUX ÉVOLUTIONS DE LEUR ENVIRONNEMENT
1 - La France doit se doter de pôles d’enseignement supérieur de renommée internationale
L’arrivée sur la scène internationale de nouveaux établissements issus de nouvelles puissances mondiales, comme l’Inde ou le Brésil, et le poids des pays anglo-saxons en matière d’enseignement supérieur et de recherche a accentué la nécessité de repenser l’attractivité de nos formations d’enseignement supérieur et un accroissement de leurs coopérations avec les secteurs professionnels.
2 - L’autonomie des établissements doit être renforcée
Le MEDEF propose de maximiser la dynamique engagée par la loi LRU. La gouvernance des universités doit traduire le projet stratégique porté par leurs acteurs dans une perspective de recherche d’excellence. Certaines universités ont vocation à offrir des formations de qualité, notamment dans les premiers cycles. Une dizaine d’universités a atteint le seuil critique pour rivaliser avec les meilleures universités mondiales. Toutes doivent être soutenues dans ces objectifs. Mais il convient désormais d’accompagner chacune à se diversifier et de plus fortement soutenir les pôles d’excellence.
3 - Les universités doivent être dotées d’instances permettant un fonctionnement plus efficace
LE MEDEF demande que le rôle des personnalités extérieures dans les CA soit clarifié et renforcé. La loi LRU a repositionné les instances de décision dans une dimension stratégique. Toutefois, cette nouvelle gouvernance n’est pas encore satisfaisante, la place des entreprises n’est utile que si les débats portent majoritairement sur des aspects stratégiques des projets et non sur des problématiques de gestion quotidienne des établissements comme cela est encore trop souvent le cas. Le MEDEF partage les propositions de l’économiste Philippe Aghion, consistant à mettre en place d’une part un conseil d’administration (board of trustees) composé largement de personnalités extérieures et débattant de sujets stratégiques, et d’autre part d’une instance académique (sénat académique) pour les aspects concernant la pédagogie et la recherche.
4 - L’action des établissements doit être amplifiée en matière d’insertion professionnelle
Les Bureaux d’aide à l’insertion professionnelle, improprement dénommés lors de leur création en 2007 par la loi LRU, doivent prendre toute leur place au sein des établissements pour contribuer à définir la politique mise en oeuvre en matière d’aide à l’orientation et à l’insertion professionnelle des étudiants, au développement des relations partenariales mais aussi et surtout, ils doivent être positionnés au coeur du processus qualité de l’établissement.
5 - Récompenser l’excellence pédagogique des enseignants au même niveau que l’excellence en matière de recherche
Il s’agit de valoriser les bonnes pratiques pédagogiques des enseignants, l’accompagnement des étudiants en matière de professionnalisation et l’attractivité des diplômes sur le marché du travail.
6 - Permettre aux universités de compenser les coûts réels de formation pour mettre en oeuvre une politique rigoureuse de lutte contre l’échec universitaire
La question de l’attractivité des universités passe moins par les flux supplémentaires d’étudiants pouvant être accueillis que par la capacité pour ces établissements de leur permettre de réussir et de s’insérer dans l’emploi. Pour valoriser la dynamique mise en oeuvre par chaque établissement en faveur de la réussite de leurs étudiants, il faut permettre aux établissements de fixer eux-mêmes leurs droits d’inscription et frais de scolarité tout en leur permettant de pratiquer une modulation critérisée selon le niveau de formation.
7 - Les universités doivent engager une nouvelle ambition numérique
Le MEDEF souhaite que l’Université, à l’instar des autres pays européens, développe les usages du numérique, en complément au sein de tous les apprentissages, et accroisse le recours aux outils adaptés pour diversifier les approches pédagogiques, notamment les « serious games ». Il s’agit autant de stimuler toutes les formes d’intelligence (logique, linguistique, spatiale) que de favoriser la personnalisation des apprentissages. Alors que l’Université a incontestablement investi le champ du numérique ces dernières années en structurant des espaces numériques de travail et des ressources disciplinaires accessibles à leurs étudiants, les apprentissages doivent désormais s’attacher, en s’appuyant sur ces outils, à développer les pratiques de travail collaboratif (intelligence collective), l’interactivité disciplinaire et la créativité. pp.8-20 >> Télécharger la contribution du Medef.
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The government launched last July 11, the meeting of higher education and research that highlight topics of debate the success of all students, a new ambition for research and higher education (role in society and the economy, the ecological transition in the international influence of our country) and the revision of the governance institutions, political sites and networks. The MEDEF present proposals, pragmatic and necessary to meet the challenges facing the French higher education. Indeed, the rise of new powers and the massification of higher education in the world highlight the need to emerge universities of excellence capable of attracting the best talent in the service of our country and our businesses, but also to support the efforts of policy research and innovation. More...