Rapport "L'implication des universités dans la formation tout au long de la vie", par SZYMANKIEWICZ Christine, CAFFIN-RAVIER Martine, CARAGLIO Martine, GAVINI-CHEVET Christine, AMBROGI Pascal-Raphaël, PRADEAUX Henry. La Mission a décidé de limiter ses investigations aux crédits du PIA 1 attribués aux opérateurs relevant budgétairement - aux termes de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) - de la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur (MIRES).
Le pilotage par l’État : financement, indicateurs de pilotage et cadre juridique, des évolutions nécessaires
a) L’intérêt de mesures incitatives financières au développement de la formation continue
Le système actuel de répartition des moyens SYMPA (système de répartition des moyens à la performance et à l’activité) a succédé, en 2009, au système, SAN REMO (système analytique de répartition des moyens), avec l’objectif d’améliorer la mise en perspective des besoins, des objectifs, du budget et en partie de la performance des établissements. Le système SYMPA devrait lui-même, laisser place à un nouveau modèle, d’aide à la décision. Pour ce qui relève de l’objet de la mission, il convient de souligner que le financement est différent selon que les publics relèvent de la formation initiale (ou de reprise d’études sans financements extérieurs) ou de la formation continue (des adultes relevant d’une convention de formation professionnelle et donc financés par un tiers). Un étudiant en formation initiale ou un adulte en reprise d’étude sans financements extérieurs est pris en compte à 100 % dans la détermination de la charge pédagogique. Un adulte relevant d’une convention professionnelle n’est, quant à lui, pas pris en compte. La situation n’a pas toujours été celle-là. Elle a évolué depuis 2004 :
– avant 2004, un adulte en FC était pris en charge à 50 % dans la détermination de la charge pédagogique ;
– entre 2004 et 2006, seules les charges retenues pour l’encadrement en personnels étaient pondérées à 50 %, tandis que les charges retenues pour la dotation théorique de fonctionnement sont tombées à zéro ;
– depuis 2006, l’adulte en FC n’est plus pris en compte dans les critères déterminant le niveau d’allocation des moyens.
Pourtant, le MENESR demande clairement, dans les contrats eux-mêmes de s’attacher à augmenter leurs ressources propres. Pour ce qui est de la mise en oeuvre de la formation continue, les universités sont appelées à s’autofinancer dans la mesure où la FC est génératrice de ressources propres.
L’argument est légitime. Néanmoins, dans un contexte de relance d’une politique publique forte en matière de formation continue, on peut s’interroger sur le paradoxe que représente le fait d’afficher une ambition (la relance, l’exhortation et l’ardente obligation à développer la formation continue et la FTLV, c'est-à-dire ce continuum entre formation initiale et formation continue) et, dans le même temps, de faire le choix de l’ignorer dans le modèle de répartition des moyens.
Dans son rapport d’étape remis au mois de janvier 2014 à la ministre, la mission d’inspection recommandait qu’au minimum, un indicateur de performance soit inscrit dans le futur modèle d’aide à la décision, qui prenne en compte l’investissement des universités en matière de formation continue. Il semble que la tutelle s’oriente ces derniers mois vers l’introduction
d’une forme d’« incitation » à réaliser davantage de formation continue.
La difficulté tiendra néanmoins dans la détermination de l’indicateur le plus pertinent pour soutenir cette politique publique, dans le contexte particulier que le rapport vient de décrire. Aucun critère simple ne semble en mesure de rendre parfaitement compte de la réalité des efforts d’une université à développer son activité de formation continue :
– le nombre de stagiaires ne tient pas compte du potentiel local de stagiaires et pourrait conduire les universités à surinvestir dans le développement de stages courts qualifiants (même si pour le moment, le risque n’existe guère compte tenu, comme on l’a vu, du faible degré d’investissement de nombreuses universités en ce domaine) ;
– le nombre d’heures-stagiaires est une incitation à développer des formations longues, éventuellement peu innovantes, dont la mission a souligné l’inadaptation aux contraintes des salariés et des demandeurs d’emploi ;
– le chiffre d’affaires ne traduit qu’une partie de l’activité de formation continue et ne valorise pas suffisamment les formations ne générant pas d’excédents dispensées en direction des demandeurs d’emploi ou celles pour lesquelles le salarié en reprise d’études a fait l’objet d’une exonération de droits.
Pour parfaire le modèle, il faudrait, d’ailleurs, en toute rigueur, élaborer un critère complexe, tenant compte d’un ensemble de variables socio-économiques, mais aussi de la taille du marché régional de la formation professionnelle et de la part de l’université dans ce marché (le bassin d’emploi dans lequel elle se situe, la politique des entreprises locales, le niveau de qualification moyen de la population, la politique régionale et d’autres facteurs plus ou moins propices à l’accroissement des ressources en formation continue). In fine, la mesure des efforts réalisés par une université pour accroître son activité de formation continue relève sans doute davantage d’une appréciation qualitative que d’un ratio simple.
Pour autant, le pire serait, selon la mission, de ne pas soutenir l’implication des universités dans la FTLV, que ce soit dans le modèle d’aide à la décision – solution que privilégie la mission à condition que modèle théorique d’aide à la décision et allocation réelle des moyens se rapprochent et rendent transparente la prise en compte des critères incitatifs – ou dans le contrat, s’il devait redevenir le levier d’une politique incitative, par le biais de moyens supplémentaires fléchés.
Deux ratios relativement simples et opérationnels lui semblent pouvoir être envisagés dans le cadre du modèle d’aide à la décision :
– l’un, fondé sur la performance actuelle des universités en matière de FTLV, pourrait être celui du nombre de stagiaires96 en formation continue rapporté à l’effectif étudiant total de l’université. Ce ratio présente l’avantage de tenir compte de la taille de l’université et traduit bien l’effort qu’elle engage pour accroître la part de la formation continue parmi ses activités. Sans revenir à la règle en vigueur avant 2004, ce ratio, exprimé en nombre d’inscrits, pourrait être pris en compte dans l’allocation des moyens d’une université dès lors que celui-ci atteint, selon le degré d’ambition souhaité pour cette politique publique, un taux compris entre 0,30 et 0,5098. Le niveau, à déterminer, de prise en charge déclenchée à partir de ce seuil incitatif pourrait éventuellement progresser en même temps que le seuil. Cette règle maintiendrait la justification des ressources complémentaires, mais reconnaîtrait aussi la réalité des dépenses supplémentaires provoquées par un afflux croissant de stagiaires en formation continue ;
– l’autre, davantage inscrit dans une logique d’incitation et de répartition, pourrait être calculé à partir des ressources générées par l’activité de formation continue divisées par le montant de la subvention pour charge de service public accordée à l’université (subvention de l’État). Voir le rapport...