Par Flore d'Arfeuille. "L'instruction doit être universelle, c'est-à-dire s'étendre à tous les citoyens. Elle doit, dans ses divers degrés, embrasser le système tout entier des connaissances humaines, et assurer aux hommes dans tous les âges de la vie, la facilité de conserver leurs connaissances et d'en acquérir de nouvelles" écrit Condorcet en 1792 dans son rapport sur L'organisation générale de l'instruction publique.
Une obligation légale
Il faudra attendre la loi du 16 juillet 1971 (Loi Delors) pour que la formation professionnelle continue devienne "une obligation nationale" (Article L6111-1 du Code du travail). Elle assure désormais "aux salariés, employés ou demandeurs d'emploi, une formation destinée à conforter, améliorer ou acquérir des connaissances professionnelles". Le Congé individuel de formation (CIF) et les fonds d'assurances formation sont mis en place tandis que les employeurs de plus de 10 salariés participent désormais au financement de la formation continue. En 1972, l'Assurance formation des activités du spectacle (AFDAS) est créée.
Les années 1980 : Une nouvelle vision de la culture
A l'aune des années 1980, l'environnement politique, social et culturel est propice à la création de l'AGECIF.
Dès 1981, l'arrivée de Jack Lang à la tête du ministère de la Culture (1981-1986 et 1988-1993) marque une rupture. Le décret du 10 mai 1982 définit ainsi les nouvelles missions du Ministère : permettre à tous les français de cultiver leur capacité d'inventer et de créer ; examiner librement leurs talents et recevoir la formation artistique de leur choix ; présenter le patrimoine culturel national, régional, ou des divers groupes sociaux pour le profit commun de la collectivité tout entière ; favoriser la création des œuvres d'art et de l'esprit et leur donner la plus vaste audience ; contribuer au rayonnement de la culture et de l'art français dans un libre dialogue des cultures du monde.
Budgets en hausse
Toutes les disciplines culturelles bénéficient de la hausse du budget du ministère de la Culture dès l'exercice 1982 (3 milliards de francs). Ainsi, dans le domaine du spectacle vivant, les moyens financiers des théâtres nationaux et des structures dramatiques décentralisées doublent, tandis que le nombre de compagnies théâtrales soutenues triple. L'aide aux nouvelles compagnies permet à la danse d'être moins confidentielle. Sans oublier enfin la loi Lang de 1985 sur les droits d'auteur, qui assure aux équipes de création une hausse et une régularité de revenus.
Croissance des industries culturelles
Le rapprochement inédit - et particulier à la France - de l'économie et la culture se confirme. L'exception culturelle désigne une réalité tangible. L'État s'implique ainsi désormais dans le développement des industries culturelles : livres, disques, films, médias audiovisuels. Il encourage également des montages financiers, comme avec la création en 1983 du nouvel Institut du Financement du Cinéma et des Industries Culturelles (IFCIC), et en 1985 des Sociétés de Financement de l'Industrie Cinématographique et de l'Audiovisuel (SOFICA). Il soutient également des salles de cinéma privé. En matière de livre, la loi Lang sur le prix unique permet à des librairies de qualité de se maintenir. Parallèlement, des institutions comme les musées éditent, par le bais de la Réunion des musées nationaux (RMN) des produits dérivés comme n'importe quelle entreprise et réalise ainsi des bénéfices notables. Le Centre National du Livre (CNL), géré par les éditeurs, répartit des fonds prélevés sur une taxe à la consommation (la reprographie). Le Centre National de la Cinématographie (CNC) est également géré de façon paritaire avec les professionnels.
Développement du mécénat
A l'instar des entreprises anglo-saxonnes, les grandes et moyennes entreprises françaises sont de plus en plus nombreuses à soutenir ou même initier des événements culturels.
Signe d'un changement des mentalités, le développement du mécénat s'institutionnalise avec la création en 1979 de l'ADMICAL (Association pour le développement du mécénat industriel et commercial) consacrée au rapprochement de la culture et de l'économie. Les institutions culturelles n'hésitent désormais plus à recevoir des fonds privés et à le faire savoir !
Déconcentration et décentralisation culturelles
Parallèlement, l'administration même du ministère de la Culture - naguère essentiellement parisienne - est déconcentrée. Et la décentralisation organisée par les lois Defferre de 1982 et 1983 se met en marche.
Dans le secteur culturel, ce mouvement se traduit par la hausse des effectifs des 22 Directions Régionales des Affaires Culturelles (DRAC) créées en 1969 sous l'ère Malraux. Les DRAC gèrent la majorité du budget de l'Etat dédié à la Culture. Des centaines de Conventions de développement culturel sont alors signées avec les collectivités locales dont le rôle en matière culturelle est de plus en plus important. Les budgets des communes, des départements et des régions ont en effet considérablement augmenté. Outre l'Etat, la culture est donc désormais gérée par les collectivités territoriales et les entreprises mécènes.
Reconnaissance des arts mineurs
Sous l'impulsion du ministère de la Culture, les pratiques culturelles alors qualifiées de mineures entrent dans le giron de la culture : chanson, musique populaire, arts décoratifs, bandes dessinées...
Ainsi, des centaines de petites et grandes salles (dont les Zénith) pour les groupes de rock sont subventionnées à Paris et en province. La photographie entre au musée, à l'instar des créateurs de mode, des publicitaires et des dessinateurs de bande dessinée. Le design industriel et la cuisine sont désormais reconnus comme disciplines artistiques.
Éducation et formation : nouveaux enjeux
L'éducation et la formation forment le socle du nouvel élan culturel. L'éducation culturelle en milieu scolaire se développe. Les baccalauréats à option artistique, les "classes culturelles", les opérations "collèges au cinéma" se multiplient, grâce aussi à l'implication des collectivités locales.
La nouvelle Délégation au Développement et aux Formations (DDF) vise "le rapprochement des professionnels de la culture avec leur public, en particulier le public scolaire".
Les régions, acteurs de la formation professionnelle
En ce qui concerne la formation, le vote de la loi du 7 janvier 1983 (relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État), conforte les conseils régionaux comme acteurs incontournables de la Formation professionnelle continue. La loi du 24 février 1984 élargit le droit au Congé Individuel de Formation (CIF) et renforce le rôle du comité d'entreprise sur la question de la formation professionnelle.
En 1985, le système de formation en alternance dans les entreprises se développe et se simplifie.
De nouveaux établissements artistiques
A cette période, l'Institut des hautes études cinématographiques (IDHEC) est restauré. Les deux Conservatoires nationaux supérieurs de musique de Paris et Lyon s'installent dans des bâtiments ultra modernes. Une École nationale du patrimoine est créée, tandis que l'École du Louvre se renforce.
Les emplois dans le secteur culturel se diversifient et se développent. Des milliers de postes de techniciens, administrateurs, ingénieurs de projet, danseurs, acteurs, archéologues, ethnologues sont créés. Ceux que l'on appelle désormais les "ingénieurs culturels", jusqu'ici issus de l'école du terrain se forment grâce à la cinquantaine de nouvelles formations universitaires spécialisées (DESS). Voir l'article...