Contibution de George ASSERAF, Président de la CNCP, à la Grande Conférence Sociale
La Grande Conférence Sociale s’est tenue au Palais d’Iéna, les 9 et 10 juillet.
Cette grande conférence a réuni durant deux jours l’Etat, les partenaires sociaux et les collectivités territoriales autour de « sept tables rondes » thématiques.
George ASSERAF, Président de la CNCP a rédigé une contribution dans le cadre de la table ronde "développer les compétences et la formation tout au long de la vie". Télécharger la contribution.
A l’attention de Monsieur le Ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Contribution à la conférence sociale, 9 et 10 juillet 2012
Thème : Développer les compétences et la formation tout au long de la vie.
Sans revenir sur les nombreux constats qui caractérisent le fonctionnement de notre marché du travail et les difficultés auxquelles sont confrontées les différentes catégories d’actifs, cette note met l’accent sur quelques points qui contribuent, ou devraient contribuer, à côté d’autres dispositions, à rendre plus efficace une politique ayant pour ambition de favoriser l’insertion ou la réinsertion professionnelle, une capacité d’adaptation tout au long de sa vie et la promotion sociale.
Poursuivre la dynamique de développement des compétences
Bien que la logique traditionnelle, qui porte les fondements de notre système éducatif, repose prioritairement sur l’acquisition et la transmission des savoirs, la notion de compétences (qu’il s’agisse de compétences transversales, transposables, disciplinaires préprofessionnelles, professionnelles et disciplinaires, etc.) connaît un intérêt croissant dans le fonctionnement de notre système de formation. Cf. travaux du CAS sur les compétences (Lainé 2011) et travaux relatifs aux référentiels de licence générale menés par le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Qu’elle soit portée par les savoirs en mettant l’accent au delà de leur transmission sur leurs usages ou qu’elle le soit par des finalités professionnelles, la logique compétences est souvent perçue comme substitutive aux savoirs alors qu’elle en est complémentaire même si dans le cadre de la validation de l’expérience, les savoirs ne sont pas issus d’un processus académique.
Qu’il s’agisse du socle commun de connaissance et de compétences visé à la fin de la scolarité obligatoire ou, au-delà, des compétences portées par les finalités des apprentissages d’un parcours de formation quelle qu’en soit la nature, une mutation profonde d’une des composantes majeures de notre système a été engagée depuis plusieurs années. Il convient de poursuivre cet effort qui touche aussi aujourd’hui l’université car la dynamique créée est de nature à réduire le décalage entre les compétences dont les entreprises ont besoin et les acquis des jeunes à la fin de leur scolarité; d’autant plus que, dans le contexte de crise que nous connaissons, les entreprises disposent de moins en moins de capacités à embaucher et à former de nouveaux collaborateurs et qu’à l’inverse elles tendent à privilégier de plus en plus ceux qui sont immédiatement productifs au sein de leurs organisations. Cette logique qui irrigue le système de formation tout au long de la vie contribue aussi à nourrir un dialogue et à établir des passerelles entre le monde de la formation et le monde socio-économique ainsi qu’à mieux faire comprendre ce que fait l’un et ce qu’attend l’autre.
Il ne s’agit évidemment pas ici de privilégier une approche « adéquationniste » dont on sait combien les modes de régulation sur les marchés du travail réduisent une hypothétique efficacité. Mais il n’en demeure pas moins qu’un des dysfonctionnements du marché du travail découle de difficultés de recrutement que connaissent des employeurs ou plus largement des secteurs, difficultés issues de désajustement des compétences et qualifications aux besoins plus que de réelles pénuries de main d’oeuvre.
Renforcer la logique de continuum dans la formation tout au long de la vie
Poursuivre cet effort qui contribue à accroître le capital compétences personnel de chacun et nourrit une réflexion profonde sur une évolution possible de la nature de notre système de formation ne doit pas nous exonérer d’une interrogation sur deux acceptions de la formation tout au long de la vie. Celle qui la considère comme une addition de deux systèmes avec d’un côté la formation initiale et de l’autre la formation continue, dans laquelle les représentations sociales dominantes conduisent à la primauté de la formation initiale et la sacralisation des diplômes sur lesquels celle-ci débouche au détriment de l’expérience professionnelle et des compétences acquises.
L’autre, inscrite dans une perspective de continuum entre formation initiale et formation continue, ou plus exactement formation « continuée », laissant plus de place à une approche compétences (sans renoncement aux savoirs) ainsi qu’à la valorisation de l’expérience professionnelle (l’entreprise y est aussi un lieu qualifiant) et qui reste porteuse d’espoirs et de possibles pour ceux qui n’auraient pas réussi sur un segment ou un moment particulier du parcours.
Créer une nouvelle dynamique en faveur de la VAE et de la validation d’acquis
C’est dans ce deuxième cadre que la création de la Validation des acquis de l’expérience par la Loi du 17 janvier 2002 a constitué tout autant qu’une formidable opportunité en faveur de la promotion sociale un levier pour le développement des compétences dans la conception et la construction même des diplômes, évolution qui n’est d’ailleurs pas sans conséquences sur les pratiques pédagogiques. Porteuse de changements tout autant qu’outil de reconnaissance la VAE devrait faire l’objet d’une nouvelle dynamique. En outre, de nouvelles formes particulières de validation d’acquis pourraient aussi faire l’objet de développement notamment dans les situations de reconversion, en favorisant une articulation entre une identification puis validation de compétences et une formation complémentaire afin de rapprocher les personnes concernées d’emplois à pourvoir.
Développer la certification professionnelle
Promouvoir le développement des compétences c’est aussi approfondir les modalités de construction des diplômes et plus largement des certifications professionnelles, portées par le répertoire national des certifications professionnelles (RNCP). Cette notion de certification professionnelle est d’ailleurs fort intéressante car elle constitue pour des diplômes et titres à finalité professionnelle et certificats de qualification (CQP crées par des Branches professionnelles) un chaînon entre le monde de la formation et le monde socio-économique dès lors qu’elle prend notamment en compte une insertion professionnelle avérée. A ce titre, elle devrait être davantage présente dans les réflexions globales visant l’évolution de la formation professionnelle. La certification professionnelle débouche sur un enregistrement au RNCP qui atteste de sa reconnaissance sur tout le territoire national. Cet enregistrement est générateur de droits pour les individus (contrats de professionnalisation, financement de parcours de VAE, etc.) et ouvre des possibles pour les organismes (formation par apprentissage, appels d’offre de Régions, OPCA, Pôle emploi, etc.).
Développer les compétences est donc nécessaire pour répondre au défi de l’insertion voire de la réinsertion professionnelle mais n’est pas suffisant. Il faut aussi en assurer le signalement tant pour sécuriser les parcours professionnels que parfois en préciser la reconnaissance sociale notamment sur le marché de l’emploi et la reconnaissance nationale (lorsqu’enregistrée au RNCP) afin notamment de faire disparaître des pratiques de nature discriminatoire en matière d’accès à certaines activités au sein de grandes entreprises ou dans des collectivités territoriales. Dans le cadre du recrutement de collaborateurs, une grande entreprise nationale ne reconnaît pas le même niveau à des certifications professionnelles alors qu’elles sont reconnues nationalement au même niveau que les diplômes de l’Education nationale.
Développer le signalement des compétences pour sécuriser les parcours professionnels Pour autant, le RNCP ne peut constituer le seul instrument vecteur de l’ensemble des certifications professionnelles et des formations qualifiantes. Il y a nécessité de labelliser des certifications de compétences correspondant à des qualifications partielles.
Le RNCP a vocation à classer des certifications professionnelles correspondant à des métiers ou des ensembles d’activités qui font sens dans des cadres d’emplois. D’autres certifications de qualité, reflétant des blocs de compétences, doivent pouvoir être repérées et « labellisées » après un dialogue entre les parties prenantes concernées, dont les Régions. Dès 2006, le besoin d’un tel instrument a été ressenti, et la loi du 24 novembre 2009 , modifiant l’article L. 335-6 du Code de l’éducation, dispose à présent que « les certifications et les habilitations correspondant à des compétences transversales exercées en situation professionnelle peuvent être recensées dans un inventaire spécifique » établi par la CNCP.
Cet instrument dont le développement a été stoppé faute de crédits doit regrouper des certifications reconnaissant les compétences nécessaires pour exercer des professions réglementées, des certifications dont la valeur est reconnue au plan international (en particulier dans le domaine des langues) et des compétences transversales, comme celles liées au tutorat en entreprise, qui pour autant ne correspondent pas à un niveau de qualification. Il est à noter que ce concept a été partiellement repris au niveau de l’Union européenne, qui réfléchit à un instrument recensant des qualifications internationales (exemple des licences permettant d’exercer dans certains secteurs comme l’aéronautique) Cette démarche serait par ailleurs renforcée par l’enrichissement et l’aboutissement des travaux sur la future nomenclature des niveaux de certifications, la nomenclature actuelle datant de 1969 et reflétant la suprématie du diplôme. D’autant que 40 ans après, elle n’est plus à même de couvrir la complexité de notre marché de l’emploi et des compétences qu’il requiert.
Favoriser les synergies entre instances à caractère national
Enfin, il serait souhaitable de favoriser une plus grande cohérence des actions portées par des organismes publics à caractère national intervenant dans le champ de la formation professionnelle. Leurs champs d’action sont voisins souvent complémentaires mais la synergie qu’ils seraient en capacité de produire dans le cadre de leurs activités respectives n’est pas assez stimulée. Un comité des directeurs et/ou des présidents et secrétaires généraux de ces instances pourrait être réuni régulièrement par le Ministre auquel ils sont tous rattachés afin de mettre l’accent sur les feuilles de route et les inciter à associer leurs compétences lorsque cela est de nature à produire une plus grande valeur ajoutée que la somme de leurs activités menées indépendamment les unes des autres. George ASSERAF, Président de la CNCP
Pour des raisons de délai, ce texte n’a pu faire l’objet d’une concertation au sein de la Commission nationale de la certification professionnelle (CNCP). Il n’engage donc que son auteur.
Great Social Conference held at the Palace of Jena, 9 and 10 July.
This major conference brought together over two days the state, social partners and local authorities around "seven round tables" theme.
Asséraf George, President of the CNCP has produced a contribution as part of the roundtable "develop the skills and training throughout life." Download the contribution.
For the attention of the Minister of labor, employment, vocational training and social dialogue.
Contribution to the Social Conference, 9 and 10 July 2012
Theme: Developing skills and training throughout life. More...