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Formation Continue du Supérieur
24 novembre 2019

Les réfugiés et les autres

Accueil - Vie PubliqueLe débat public des dernières années s’est beaucoup intéressé à la distinction entre deux catégories de migrants : les réfugiés, d’une part… et tous les autres, d’autre part, ces derniers étant réputés n’avoir aucun titre à demeurer sur le territoire d’États dont ils ne sont pas les ressortissants.
La réalité est plus complexe et plusieurs catégories doivent être distinguées, en fonction notamment du pouvoir de l’État quant à la décision de reconnaître qu’un migrant fait ou non partie de telle ou telle catégorie. Ainsi, concernant les réfugiés et bénéficiaires d’une protection subsidiaire (voir infra) – qui forment la catégorie plus générale des bénéficiaires d’une protection internationale –, l’État est lié par des instruments internationaux et européens. Ceux-ci l’obligent à reconnaître cette qualité aux personnes répondant à ces stipulations, qu’elles soient entrées ou non régulièrement sur son territoire.

Le débat public des dernières années s’est beaucoup intéressé à la distinction entre deux catégories de migrants : les réfugiés, d’une part… et tous les autres, d’autre part.

De même, certains textes internationaux, surtout européens, obligent l’État à permettre l’accès et le séjour à son territoire aux personnes dont un membre de la famille réside régulièrement sur celui-ci. Quant aux travailleurs, étudiants et autres migrants réguliers, ils forment pour leur part des catégories dont l’une des principales finalités est la politique migratoire : l’État est souverain dans la définition de ces catégories et des personnes qu’il entend y inclure. Enfin, ceux qui ne relèvent d’aucune de ces catégories sont ceux que l’on qualifie de "migrants irréguliers".

Les réfugiés et bénéficiaires d’une protection subsidiaire
Les réfugiés sont définis par l’article premier (A, § 2) de la Convention des Nations Unies du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, dite convention de Genève, complétée par le protocole relatif au statut de réfugié adopté à New York en 1967. Ils sont plus de 25 millions dans le monde.
En vertu de ces textes, repris en droit de l’Union européenne et en droit français, doit être reconnue réfugiée la personne qui "craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité, et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner".
Entrent donc dans cette catégorie les personnes répondant à trois critères au moins : se trouver hors de son pays de nationalité ou de résidence, craindre avec raison d’être persécuté pour l’un des cinq motifs conventionnels, et, enfin, ne pouvoir obtenir la protection de l’État de nationalité ou ne pas vouloir retourner dans l’État de résidence.
La personne répondant à ces conditions devra se voir reconnaître le statut de réfugié par l’État d’accueil partie à la Convention et/ou au Protocole (soit près de 150 États), à moins toutefois qu’elle n’entre dans le champ d’application d’une clause d’exclusion – existence de raisons sérieuses de penser que la personne a commis un crime grave de droit commun, une violation grave du droit humanitaire ou s’est rendue coupable d’agissements contraires aux buts et principes des Nations Unies.
L’État est donc lié par des obligations internationales concernant la définition du réfugié, mais demeure souverain quant à sa mise en œuvre : c’est bien l’État qui décide si telle personne entre ou non dans cette définition, et qui met en place les procédures nécessaires pour ce faire. La loi du 10 septembre 2018 portant divers aménagements en la matière en est une illustration récente, même s’il ne faut pas négliger le rôle de l’Union européenne en la matière, notamment concernant le droit de séjour des personnes reconnues réfugiées.
En effet, si la convention de Genève ne prévoit aucun droit de ce type, mais une simple obligation de non-refoulement des personnes sollicitant la reconnaissance du statut de réfugié vers des territoires où leur vie ou leur liberté serait menacée pour l’un des motifs conventionnels (religion, nationalité, etc.), le droit de l’Union est venu compenser ce silence. En vertu de la directive européenne "Qualification", les États membres de l’Union doivent en effet accorder aux réfugiés un titre de séjour d’au moins trois ans et renouvelable. La France pour sa part leur accorde une carte de résident, valable pendant dix ans et renouvelable également.
À cette protection conventionnelle, le droit de l’Union a ajouté une autre forme de protection, constitutive d’une autre catégorie de migrants protégés qui ne peuvent cependant être qualifiés de "réfugiés", ce terme devant être réservé aux bénéficiaires du statut prévu par la convention de Genève. Dite "protection subsidiaire", cette protection est octroyée aux personnes pour lesquelles il y a des "motifs sérieux et avérés de croire" qu’elles risqueraient de subir dans leur État d’origine la peine de mort ou une exécution, des traitements inhumains ou dégradants, ou, pour un civil, des menaces graves et individuelles en raison d’une violence aveugle résultant d’un conflit armé.
Sous réserve, ici encore, d’une éventuelle clause d’exclusion, le seul fait de fuir un conflit armé de haute intensité en tant que civil, ou de craindre, quel qu’en soit le motif, des traitements inhumains et dégradants suffit ainsi, sous l’empire du droit de l’Union européenne, à emporter protection, et octroi d’un titre de séjour d’un an renouvelable au minimum (porté à quatre ans en droit français depuis la loi de septembre 2018).
Les personnes bénéficiaires du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire appartiennent à la catégorie plus générale, peu usitée dans le débat public mais fréquente dans les textes, des "bénéficiaires d’une protection internationale".
Quant à ceux qui ont sollicité cette protection mais sont en attente d’une décision, ils forment la catégorie des "demandeurs d’asile", ou "demandeurs de protection internationale". Ils sont, à ce titre et sauf exception, protégés contre le refoulement et l’expulsion, et doivent se voir reconnaître certains droits et conditions matérielles d’accueil, en vertu de la convention de Genève et, surtout et à nouveau, du droit de l’Union européenne.
La demande d’asile apparaît ainsi, pour un migrant entré illégalement sur le territoire d’un État, comme un moyen de s’y maintenir le temps qu’il y soit répondu. C’est la raison pour laquelle se multiplient aujourd’hui dans les États les politiques visant à éviter que les migrants n’entrent irrégulièrement sur leur territoire ou, s’ils y parviennent, à réduire le temps d’examen des demandes de protection. Plus...
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