ogo2003modifII. Pour une plus grande reconnaissance et un meilleur accompagnement des enseignants-chercheurs dans l'ensemble de leurs missions
Chapitre II Les hypothèses d’évolution des droits d’inscription universitaires
II - Un besoin de financement supplémentaire qui reste à mesurer
B - Une estimation fragile, qui ne tient pas compte des mesures d’efficience attendues en matière d’enseignement supérieur
2 - Des évolutions démographiques à considérer sur la durée, un impact financier à relativiser

La part du besoin de financement liée à la croissance du nombre d’étudiants représente, selon la fourchette retenue par le Livre blanc, entre 41 % et 59 % du montant supplémentaire invoqué par les acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Les projections démographiques relatives au nombre d’étudiants entrant dans l’enseignement supérieur montrent une hausse incontestable des effectifs. Selon les données du MESRI, « si les tendances en termes d’orientation, de poursuite d’études et de démographie se prolongent, l’enseignement supérieur pourrait rassembler, en 2021, 2,8 millions d’étudiants et, en 2026, 2,9 millions d’étudiants, soit respectivement 216 000 et 327 000 étudiants de plus qu’en 2016 ».
Les effets de cette croissance démographique sur les effectifs étudiants de l’enseignement supérieur public doivent cependant être relativisés, de même que son impact financier.
D’une part, la croissance ne se portera pas dans son intégralité sur l’enseignement public, et notamment sur les universités. En 2026, sur les 327 000 étudiants supplémentaires par rapport à 2016 (+13 %), seuls 54,7 % devraient s’inscrire en université (179 000, soit + 11,8 %). Les effectifs des autres formations (écoles de commerce, facultés privées, etc.) seraient « particulièrement dynamiques, avec une croissance de 18 % », et l’augmentation la plus importante concernerait les formations d’ingénieurs non universitaires (+22 %).
D’autre part, la croissance démographique ne sera pas nécessairement durable. Les effets de la hausse seront moins sensibles après 2020, notamment en raison des comportements d’étude : « si la démographie des populations arrivant dans le supérieur connait une forte hausse en 2018, elle se réduit quelque peu les années suivantes (…). L’effet d’une hausse de l’entrée
dans l’enseignement supérieur se propage sur l’effectif total mais s’amoindrit au bout de quelques années, en lien avec la durée de la scolarité. C’est pourquoi, si on observe une forte hausse des inscriptions totales sur la période 2018-2020, la progression annuelle prévue en 2021 et 2022 est beaucoup moins forte (de l’ordre de 1 % chaque année) ».
Par ailleurs, des évolutions démographiques ne se traduisent pas de façon mécanique par une augmentation des charges pour les établissements. L’impact de la croissance du nombre d’étudiants sur le besoin des établissements en personnel, paramètre crucial dans la mesure où la masse salariale représente en moyenne 73,78 % des dépenses des universités, doit être nuancé.
Concernant les personnels administratifs, des marges d’efficience existent dans les universités en matière de temps de travail. Dans son rapport sur l’autonomie financière des universités, la Cour relevait que, alors que la durée légale du travail est en principe de 1 607 heures par an, le temps de travail annuel s’y établissait à 1 551 heures en 2015 sous l’effet de la circulaire n°2002-007 du 21 janvier 2002 du ministère de l’éducation nationale. L’application de ce texte ne semblait pas, pourtant, fondée sur des sujétions particulières liées à la nature des missions et à la définition des cycles de travail pouvant justifier un régime dérogatoire.
Il en est de même pour les personnels enseignants. Selon les projections démographiques du MESRI, la croissance du nombre d’étudiants en université entre 2016 et 2026 concernerait uniquement les premiers cycles de l’enseignement supérieur (+12,7 % en licence et +13,1 % en master) alors que les effectifs de doctorants pourraient diminuer de 13 %. Ces évolutions appellent à un accroissement de l’activité de formation relativement à l’activité de recherche. La progression du nombre d’étudiants dans les premiers cycles devrait imposer (ne serait-ce que de façon temporaire, lors du pic démographique prévu entre 2018 et 2020), soit un accroissement du nombre des personnels se consacrant uniquement aux tâches d’enseignement (PRAG et PRCE, par exemple), soit une modulation de l’activité des enseignants-chercheurs au profit de l’enseignement.
Or la modulation des obligations de service des enseignants-chercheurs a, au contraire, « été systématiquement utilisée pour réduire le temps d’enseignement au profit de la recherche ou de charges administratives, ce qui a entraîné des coûts d’heures complémentaires et de vacations, sans favoriser l’augmentation de l’enseignement pour ceux qui ne font plus de recherche. » La Cour a notamment relevé que « les universités sont nombreuses à avoir décidé d’une décharge de services partielle (en général entre 48 et 64 heures équivalent travaux dirigés) pour les jeunes maîtres de conférences afin de leur permettre de mener à bien leurs projets de recherche. »
Au total, si la progression du nombre d’étudiants dans les prochaines années est incontestable, ses impacts financiers, notamment en termes de besoins de recrutement, devront être mesurés en tenant compte des marges d’efficience attendues dans la gestion des établissements et des personnels, notamment en matière d’offre d’enseignement.
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