Introduction
Dans les années 1960 et 1970, les sciences humaines et sociales françaises, les SHS, rayonnaient, faisant de notre pays le coeur d’une vie intellectuelle planétaire. Jacques Le Goff, François Furet, Emmanuel Le Roy Ladurie, Michel Foucault, Pierre Bourdieu, Alain Touraine, Raymond Aron, Louis Althusser, Jean Baudrillard, Jacques Derrida, Paul Ricoeur, Claude Lévi-Strauss, Maurice Godelier, Jacques Lacan, Julia Kristeva, Roland Barthes, et tant d’autres : nos grandes figures de l’histoire, de la sociologie, de la philosophie, de l’anthropologie, de la psychanalyse, de la sémiologie, etc., bénéficiaient d’une aura et d’une influence mondiales, bien au-delà de leur spécialité ou de leur discipline. Étudiants et chercheurs se pressaient venus du monde entier pour suivre leurs enseignements et leurs séminaires.
Ne construisons pas un mythe, ne faisons pas de cette époque un âge d’or. Il régnait souvent aussi des idéologies sans nuance et l’articulation avec la politique pouvait déboucher sur des appels à la violence, voire sur la tentation terroriste 1. Reconnaissons que la période actuelle donne une tout autre image que celle de sciences humaines et sociales françaises flamboyantes, centrales à l’échelle de la planète, apportant leurs catégories et leurs références aux chercheurs qui, de plus en plus nombreux, font vivre ces disciplines de par le monde. Et notons aussi, au passage, que les eaux se sont à bien des égards séparées entre l’univers de la recherche en sciences humaines et sociales et celui de l’action politique.