Dans la plupart des pays européens, les langues des signes ne sont pas utilisées comme langues d'enseignement. Le CELV travaille actuellement à l’établissement de normes européennes pour définir des niveaux de compétence pour utiliser les langues des signes dans les études conçues pour les personnes sourdes ou malentendantes, afin que les enseignants de langues des signes, et en particulier les interprètes, puissent mieux répondre aux besoins de la communauté qu'ils desservent.
Les langues des signes sont reconnues comme langues autochtones d'Europe, mais leur utilisation comme langues d'enseignement varie fortement à travers le continent. Dans le cadre du projet PRO-Sign, l’équipe de projet du CELV travaille à l'établissement de normes européennes en vue de définir des niveaux de compétence pour utiliser les langues des signes dans les études conçues pour les personnes sourdes et malentendantes et dans les programmes de formation des interprètes. Ces normes bénéficieront aux enseignants de langues des signes, aux institutions dans lesquelles ils enseignent, aux étudiants entendants des langues des signes - qu’ils soient entendants ou sourds, au métier d'interprète et aux communautés sourdes qui utilisent les services publics, notamment l'éducation tout au long du cycle de vie, par l'intermédiaire de l'interprétation. (Leeson, juin 2014)
Les langues des signes en Europe
Les langues des signes font partie intégrante de la diversité multilingue de l'Europe. En général, chaque pays a sa propre langue des signes nationale; certains pays ont plus d'une langue des signes. A titre d’exemple, en Finlande, à la fois la langue des signes finnoise et la langue des signes finno-suédoise sont utilisées ; en Suisse, les langues des signes suisse-allemande, suisse-française et suisse-italienne coexistent. Il est essentiel de noter que la répartition de ces langues varie, tout comme c’est le cas pour beaucoup de langues régionales ou minoritaires d'Europe. Ainsi, par exemple, alors que les langues des signes britannique et irlandaise se trouvent sur l'île d'Irlande, la langue des signes irlandaise est principalement utilisée dans la République d'Irlande et la langue des signes britannique est la langue des signes dominante de l'Irlande du Nord. En Irlande du Nord, la langue des signes irlandaise est principalement utilisée par les membres de la communauté catholique (cp.Sutton-Spence & Woll2007). Aussi riches que les langues parlées en termes de grammaire, de structure, de syntaxe et de lexique, les langues des signes constituent un atout de la grande diversité linguistique et culturelle que les pays européens ont à offrir.
L’un des mythes qui perdurent repose sur l'idée selon laquelle il existe une langue des signes universelle. Or, tel n‘est pas le cas. Au fil du temps, les langues des signes ont naturellement évolué dans les communautés des sourds et sont indépendantes des langues parlées qui les entourent géographiquement. Comme les langues parlées, les langues des signes présentent des variations selon la région, le groupe social ou ethnique, la situation sociale, l'âge et le sexe.
Les langues des signes sont la première langue ou la langue préférée pour beaucoup de personnes sourdes. Elles sont aussi la « langue maternelle » de nombreuses personnes entendantes qui grandissent avec des membres de la famille sourds et remplissent le même éventail de fonctions que les langues parlées. En raison de l'absence de chiffres fiables, il est difficile de fournir le nombre exact d'utilisateurs des langues des signes en Europe. Il ressort des estimations que près de 1 enfant sur 1 000 naît avec une déficience auditive sévère à profonde. Cela indiquerait une population de quelque 80 000 personnes sourdes et de 16 millions de personnes malentendantes en Allemagne, par exemple (Deutscher Gehörlosen-Bund e.V. 2015). Il peut être supposé que le nombre total d'utilisateurs de langues des signes est encore beaucoup plus élevé en Allemagne.
Au niveau de l'Union européenne, l'Union européenne des Sourds estime qu'il existe environ 750 000 utilisateurs sourds de langues des signes (Wheatley & Pabsch2010). En moyenne, les utilisateurs sourds de langues des signes représentent environ 0,1 % de l'ensemble de la population d’un pays donné. Ce chiffre ne tient pas compte des personnes apprenant une langue des signes comme une seconde langue ou les enfants de parents sourds ou d'autres membres de la famille. Selon Brita Bergman, linguiste suédoise, (Britta Février 2001. Document présenté à l'ouverture officielle de l’Année européenne des langues de l'Union européenne / Conseil de l'Europe, Lund, Suède) il existerait pour chaque utilisateur sourd d’une langue des signes une dizaine de personnes entendantes utilisant une langue des signes ; ce chiffre inclurait les enfants d'utilisateurs sourds de langues des signes, les membres de la famille, les amis, les enseignants, les interprètes, ainsi que des personnes entendantes qui apprennent une langue des signes afin de communiquer avec la communauté locale des personnes sourdes. A partir de cette estimation, le nombre d’utilisateurs sourds et entendants de langues des signes s’élèverait à 8,5 millions de personnes dans l'Union européenne.
Extrapolés aux Etats membres du Conseil de l'Europe dont la population est estimée à 820 millions de personnes, il y aurait environ 820 000 utilisateurs sourds de langues des signes et quelque 8,2 millions d’utilisateurs entendants de langues des signes, soit au total plus de 9 millions d’utilisateurs de langues des signes dans toute la région.
La langue des signes et l'éducation des personnes sourdes
Même si de nombreux pays européens ont déjà reconnu leurs langues des signes nationales, il reste à traiter la question de leur usage comme langues d'enseignement. Ainsi, les enfants sourds ont généralement un accès très limité à l'éducation, où la langue d'enseignement est leur langue des signes locale/régionale. Dans certains pays, des interprètes en langues des signes sont mis à la disposition des enfants sourds dans le système classique d’enseignement ; cette situation n’est cependant pas sans poser de problème, car elle suppose que les enfants sourds devront avoir acquis ou appris leur langue des signes locale/régionale avant d'entrer dans l'école, ce qui n’est pas toujours le cas. Un autre facteur entre encore en jeu : selon les estimations de l'Union européenne des sourds en 2010, le rapport entre les interprètes professionnels et les utilisateurs sourds en langues des signes est de 1 à 62. (Wheatley & Pabsch 2010)
Pour assurer l'accès aux services publics et, surtout, à l'éducation à travers le cycle de vie pour les futures générations des communautés sourdes de toute l'Europe, un projet du CELV vise à instaurer des standards européens pour spécifier les niveaux de compétence en langues des signes pour les utiliser dans les études pour les personnes sourdes et dans les programmes de formation en interprétation proposés dans l'enseignement supérieur. PRO-Sign est le premier projet qui cherche à élaborer des matériaux susceptibles de bénéficier aussi bien aux enseignants de langues des signes, qu’aux institutions dans lesquelles ils enseignent, aux étudiants entendants et sourds de langues des signes, et au métier d’d'interprète dans son ensemble. Pour plus d'informations, veuillez consulter le site web du projet.
Le CELV est convaincu que les langues des signes sont très importantes pour l’éducation à la fois des personnes sourdes et entendantes, y compris de ceux qui choisissent des carrières en tant qu’interprètes et d’enseignants. Ainsi, le CELV cherche à renforcer la coopération avec les associations et les experts représentant les utilisateurs des langues des signes. Des outils concrets pour améliorer l’apprentissage de ce groupe cible sont actuellement en cours de développement.
Ressources principales
Signed Languages in Education in Europe: a preliminary exploration - Lorraine Leeson
This paper briefly describes some issues concerning education in signed languages insofar as the availability of data permits at this time. In order to contextualise the discussion, we briefly outline the diversity of approaches that are applied in a European context (oralism/auralism, ‘Total-communication’, bilingualism) and make reference to the specific issues that arise for deaf/ hard of hearing children who do not attend a special school/ unit for the deaf in terms of accessing a signed language. Télécharger la publication. Voir l'article...
