II. Pour une plus grande reconnaissance et un meilleur accompagnement des enseignants-chercheurs dans l'ensemble de leurs missions
Chapitre II Les hypothèses d’évolution des droits d’inscription universitaires
III - Les implications des différentes modalités d’évolution des droits d’inscription universitaires
B - L’hypothèse risquée d’une augmentation des droits pour les seuls étudiants étrangers
3 - Le relèvement des droits d’inscription des étudiants étrangers
b) La différenciation des droits d’inscription pourrait permettre d’apporter entre 6 M€ et 554 M€ de financement complémentaire aux universités
La France compte 231 120 étudiants étrangers inscrits à l’université en 2016-2017. Dans le cadre des différentes hypothèses d’évolution des droits, 133 150 d’entre eux seraient concernés, selon un mode de calcul qui, du fait de l’indisponibilité de certaines données, aboutit à une estimation trop haute par rapport à l’effectif réellement concerné.
Plusieurs scénarios d’augmentation des droits d’inscription à l’université pour les étudiants étrangers peuvent être envisagés. Des simulations des gains par rapport au produit actuel de droits d’inscription pour la population identifiée, à savoir 31,7 M€, ont été réalisées pour cinq hypothèses de calcul. Les simulations portent sur l’effectif total estimé des étudiants étrangers, soit 133 150 étudiants.
Hypothèses de calcul du gain potentiel d’une hausse des droits d’inscription pour les étudiants étrangers
La première hypothèse porte sur un doublement par rapport aux droits actuels. Il est décliné avec (1A) et sans (1B) application de cette mesure aux doctorants.
La deuxième hypothèse implique une augmentation des droits d’inscription à 600 € en licence, 1 200 € en master et 2 000 € pour le diplôme d’ingénieur. L’option 2A prévoit une augmentation des droits en doctorat à 2 000 € et l’option 2B un maintien des droits en doctorat à leur niveau actuel et une augmentation plus forte pour le diplôme d’ingénieur à 2 500 €.
La troisième hypothèse prévoit une augmentation forte des droits d’inscription, portés à 1 500 € en licence, 3 000 € en master et en doctorat pour l’option 3A et 4 000 € pour le diplôme d’ingénieur.
Les droits en doctorat sont maintenus à leur niveau actuel dans l’option 3B.
La quatrième hypothèse porte sur une application de droits identiques à tous les niveaux, d’un montant de 2 000 €.
La cinquième hypothèse porte sur une augmentation très importante des droits d’inscription pour les étudiants étrangers, plus proche du coût réel des formations. Les droits seraient fixés à 6 000 € en licence, 10 000 € en master et 12 000 € pour le diplôme d’ingénieur et maintenus à leur niveau actuel en doctorat.
Le gain supplémentaire par rapport au produit actuel des droits irait de 6,3 M€ (doublement des droits et taux d’éviction de 40 %) à 945,8 M€ (droits portés à 6 000 € en licence et à 10 000 € en master, et taux d’éviction nul). Il paraît probable que le taux d’éviction soit élevé (jusqu’à 40 % dans l’hypothèse d’une forte hausse des droits), notamment compte tenu de l’origine géographique des étudiants étrangers, en majorité issus du continent africain. L’hypothèse d’un gain de 554,8 M€ dans le cas d’une hausse maximale des droits d’inscription apparait donc plus recevable.
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Les droits d’inscription - 3 - Le relèvement des droits d’inscription des étudiants étrangers
II. Pour une plus grande reconnaissance et un meilleur accompagnement des enseignants-chercheurs dans l'ensemble de leurs missions
Chapitre II Les hypothèses d’évolution des droits d’inscription universitaires
III - Les implications des différentes modalités d’évolution des droits d’inscription universitaires
B - L’hypothèse risquée d’une augmentation des droits pour les seuls étudiants étrangers
3 - Le relèvement des droits d’inscription des étudiants étrangers
a) Des effets d’éviction difficiles à évaluer en amont
L’effet d’une hausse des droits d’inscription sur le nombre d’étudiants étrangers choisissant de venir étudier en France est difficile à évaluer. D’un côté, augmenter les droits d’inscription pourrait jouer comme un « signal-prix » à l’égard d’une partie du public étudiant concerné. En effet, les étudiants originaire d’Asie-Océanie, qui représentent 16 % des étudiants étrangers en France en 2016-2017, seraient très attachés au montant de droits d’inscription exigés pour une formation, reflet de la qualité de celle-ci selon eux. D’un autre côté, le niveau faible des droits d’inscription à l’université, où sont inscrits 71 % des étudiants étrangers en France, peut constituer un facteur d’attractivité de l’enseignement supérieur français. Des droits d’inscription plus élevés pourraient dissuader certains étudiants de venir étudier en France, soit en raison de moyens insuffisants pour prendre en charge ces coûts supplémentaires, soit parce qu’ils considèreraient le tarif comme non justifié au regard de l’offre de formation.
Les expériences étrangères offrent des enseignements contrastés sur les effets d’une différenciation des droits d’inscription sur les effectifs d’étudiants étrangers accueillis sur le territoire national.
Les cas particuliers de la Suède, du Royaume Uni et du Danemark
Depuis le 1er juillet 2011, la Suède a décidé de soumettre les étudiants étrangers non communautaires au paiement de droits d’inscription, alors même que son modèle d’enseignement supérieur repose sur la gratuité. Les universités ont obtenu la responsabilité de fixer le montant de ces droits, qui doivent permettre de couvrir le coût de la formation. À la suite de l’entrée en vigueur de ce nouveau dispositif, le nombre d’étudiants étrangers en mobilité entrante a connu une forte baisse, passant de 46 700 étudiants en 2010-2011 à 32 600 étudiants (niveau le plus bas) en 2013-2014, soit - 30,2 %. En 2016-2017, la Suède comptait 35 900 étudiants étrangers en mobilité entrante (dont 40 % en échange), soit une baisse de 23,1 % par rapport à 2010-2011.
À l’inverse le Royaume-Uni pratique la différenciation des droits d’inscription, couplée à une politique restrictive en matière de visas, et demeure le deuxième pays d’accueil d’étudiants étrangers dans le monde. Il a accueilli 428 724 étudiants en mobilité internationale en 2014, soit une hausse de 16,2 % par rapport à 2009 malgré un net recul en 2013, sans doute lié au durcissement des conditions d’accès pour les étudiants hors UE et à une forte augmentation des coûts d’études.140 Les étudiants étrangers non ressortissants de l’UE paient en effet des droits d’inscription dont le montant doit permettre de couvrir la quasi-totalité du coût de leur formation.
Le Danemark a instauré des droits d’inscription différenciés pour les étudiants étrangers extra-communautaires en 2006, qui se sont traduits par une baisse des flux d’arrivée des étudiants extra-communautaires en mobilité indépendante de 35 % la première année, avant de revenir à leur niveau en 2011. L’éventuel effet d’éviction lié à la modulation des droits en fonction de la nationalité revêt une importance stratégique pour l’attractivité de la France, sa diplomatie d’influence et son économie. En effet, le produit escompté d’une éventuelle augmentation des droits d’inscription pour les étudiants étrangers doit être comparé à l’apport de ces derniers à l’économie française, évalué à environ 1,7 Md€ selon une étude de Campus France réalisée avec BVA. Ce montant représente la différence entre l’apport économique global des étudiants et de leurs proches sur le territoire français, durant le séjour d’étude, et le coût de leur accueil pour la France, incluant les coûts de formation et les aides directes et indirectes. Ce gain pour l’économie française pourrait être réduit si l’effet d’éviction associé à une hausse du montant des droits d’inscription était élevé. L’intérêt d’une mesure visant à la différenciation des droits pour les étudiants étrangers serait alors limité.
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Les droits d’inscription - c) Une pratique déjà mise en oeuvre dans certains établissements français
II. Pour une plus grande reconnaissance et un meilleur accompagnement des enseignants-chercheurs dans l'ensemble de leurs missions
Chapitre II Les hypothèses d’évolution des droits d’inscription universitaires
III - Les implications des différentes modalités d’évolution des droits d’inscription universitaires
B - L’hypothèse risquée d’une augmentation des droits pour les seuls étudiants étrangers
2 - Des questions d’opportunité
c) Une pratique déjà mise en oeuvre dans certains établissements français
La différenciation du régime de droits d’inscription pour les étudiants étrangers est déjà pratiquée dans certains établissements d’enseignement supérieur public. Ainsi, dans les systèmes de droits modulés en fonction du revenu pratiqués à Sciences Po ou à l’université Paris-Dauphine, les étudiants étrangers non ressortissants de l’espace européen sont redevables de la tranche maximale du barème des droits d’inscription, à savoir 10 250 € en bachelor et 14 100 € en master à Sciences Po et 2 200 € en licence et 6 160 € en master à Paris-Dauphine. Par ailleurs, les récentes modifications des arrêtés relatifs aux droits d’inscription dans les écoles d’ingénieur hors programme 150 relevant notamment du ministère des armées, du ministère de l’agriculture ou du ministère de l’économie ont fixé des droits d’inscription plus élevés pour les étudiants étrangers non communautaires.
À titre d’exemple, les droits de scolarité des élèves étrangers dans les formations d’ingénieur de l’Institut Mines-Télécom sont fixés à 4 150 € pour les élèves étrangers depuis le 1er juillet 2016 alors qu’ils sont de 2 150 € ou 2 650 € pour les élèves français ou ressortissants de l’UE, de l’EEE ou de la Suisse137. Les droits de scolarité pour les élèves étrangers suivant les formations en vue d’un diplôme national de l’enseignement supérieur agricole sont fixés à 3 892 € pour 2017-2018, 4 086 € pour 2018-2019 et 4 290 € pour 2019-2020138. Ce montant s’applique aux étudiants étrangers non ressortissant de l’UE, de l’EEE ou de la Confédération helvétique, qui ne sont ni membres de la famille d’un citoyen européen ni résidents de longue durée ni fiscalement domiciliés en France depuis au moins deux ans. Afin de tenir compte de la situation particulière des étudiants africains inscrits dans les formations d’ingénieur agronome des écoles du ministère de l’agriculture, bénéficient également d’un alignement de leurs droits de scolarité sur ceux des étudiants français les étudiants ressortissants d’un État susceptible de bénéficier des aides du fonds de solidarité prioritaire.
Quel que soit l’établissement d’enseignement supérieur public considéré, le montant des droits d’inscription différenciés ne couvre pas l’intégralité du coût de la formation des étudiants étrangers, dont une partie reste financée par d’autres types de ressources des établissements, principalement la subvention pour charges de service public.
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Les droits d’inscription - b) Un périmètre d’application à définir avec prudence
II. Pour une plus grande reconnaissance et un meilleur accompagnement des enseignants-chercheurs dans l'ensemble de leurs missions
Chapitre II Les hypothèses d’évolution des droits d’inscription universitaires
III - Les implications des différentes modalités d’évolution des droits d’inscription universitaires
B - L’hypothèse risquée d’une augmentation des droits pour les seuls étudiants étrangers
2 - Des questions d’opportunité
b) Un périmètre d’application à définir avec prudence
La notion d’étudiant extracommunautaire ne correspond pas à un bloc indifférencié et doit être cernée avec précaution.
Le critère fiscal est souvent avancé pour justifier un régime différencié en matière de droits d’inscription pour les étudiants non européens. En effet, dans un système reposant sur un degré élevé de socialisation des dépenses, c’est notamment l’impôt sur le revenu qui finance l’enseignement supérieur. Cette logique contributive via le système fiscal justifierait l’application de droits différenciés pour les étudiants étrangers non communautaires venant étudier en France de manière temporaire au titre de la mobilité internationale, sans s’y établir par la suite et donc sans contribuer au financement de l’enseignement supérieur via l’impôt.
L’application du critère fiscal devrait exclure les étudiants étrangers résidents en France, définis comme ayant le statut de résident de longue durée ou étant titulaire d’une carte de séjour temporaire et dépendant d’un foyer fiscal situé en France depuis au moins deux ans. Ces critères sont ceux qui permettent à un étudiant étranger de demander l’attribution d’une bourse sur critères sociaux.
Afin de n’inclure dans le dispositif que les étudiants qui séjournent en France de manière temporaire pour une partie de leurs études, les étudiants titulaires d’un baccalauréat français pourraient également bénéficier du même traitement que les ressortissants français, afin de ne pas porter atteinte à l’attractivité de l’enseignement français à l’étranger et de tenir compte du choix de ces étudiants et de leurs familles d’inscrire durablement leur parcours de formation dans l’enseignement français.
Seraient également exemptés du paiement de ces droits différenciés les étudiants extracommunautaires venant étudier en France dans le cadre d’un programme d’échange, afin de ne pas porter atteinte aux engagements internationaux de la France.
Une grande attention devrait être prêtée au montant des droits pour les doctorants, qui est un élément d’attractivité de la recherche française (les étudiants étrangers représentent 41 % des doctorants en France). Comme l’a proposé France Stratégie en 2015 dans son rapport Investir dans l’internationalisation de l’enseignement supérieur, les droits d’inscription pourraient rester à un niveau faible pour les doctorants dans une « logique d’attraction des étudiants les plus qualifiés » au service de la recherche française.
Enfin, la question des modalités de différenciation des droits d’inscription devrait être posée. Il conviendrait de décider si les nouveaux droits d’inscription seraient uniquement applicables aux nouveaux inscrits dans un cycle d’enseignement supérieur ou à l’ensemble des étudiants étrangers remplissant les critères. La première solution apparaîtrait préférable pour éviter de bouleverser les conditions d’études déjà entamées, surtout si l’augmentation des droits d’inscription s’avérait substantielle.
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Les droits d’inscription - a) Un système d’enseignement supérieur attractif pour les étudiants étrangers
II. Pour une plus grande reconnaissance et un meilleur accompagnement des enseignants-chercheurs dans l'ensemble de leurs missions
Chapitre II Les hypothèses d’évolution des droits d’inscription universitaires
III - Les implications des différentes modalités d’évolution des droits d’inscription universitaires
B - L’hypothèse risquée d’une augmentation des droits pour les seuls étudiants étrangers
2 - Des questions d’opportunité
a) Un système d’enseignement supérieur attractif pour les étudiants étrangers
Quatrième pays d’accueil d’étudiants étrangers selon l’Unesco, derrière les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie, la France a accueilli 323 933 étudiants étrangers en 2016-2017, dont 231 120 dans les universités (soit 71,3 %), contre 309 642 étudiants étrangers à la rentrée 2015-2016, dont 225 366 à l’université (72,7 %).
Les étudiants étrangers en France sont majoritairement originaires d’Afrique (44,8 %) et d’Europe (25,7 %). La répartition des étudiants extracommunautaires par université est inégale : leur proportion dans l’effectif étudiant varie entre 1 % et 24 % selon les universités.
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Les droits d’inscription - 1 - Les principes juridiques
II. Pour une plus grande reconnaissance et un meilleur accompagnement des enseignants-chercheurs dans l'ensemble de leurs missions
Chapitre II Les hypothèses d’évolution des droits d’inscription universitaires
III - Les implications des différentes modalités d’évolution des droits d’inscription universitaires
B - L’hypothèse risquée d’une augmentation des droits pour les seuls étudiants étrangers
1 - Les principes juridiques
Une mesure visant l’augmentation des droits pour les étudiants étrangers devrait exclure de son champ d’application les étudiants ressortissants d’un État membre de l’Union européenne (UE), d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) ou de la Confédération suisse. Une telle hypothèse ne concerne donc que les étudiants dits extracommunautaires.
En effet, l’article 18 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) interdit toute discrimination exercée à l’encontre de citoyens de l’UE en raison de la nationalité. La Cour de justice a rappelé que ce principe implique que les étudiants de l’UE qui étudient dans n’importe quel pays de l’Union ont le même droit à des prestations que les étudiants du pays. La seule dérogation concerne les prêts étudiants et les bourses d’études, qui constituent des aides d’entretien et qui, selon le droit dérivé de l’UE, sont expressément exclus du champ d’application du principe d’égalité de traitement.
De même, le principe de non-discrimination en raison de la nationalité s’applique aux citoyens des États parties à l’EEE en application de l’Accord sur l’EEE et aux citoyens suisses en vertu des accords conclus entre la Suisse et l’UE, afin de garantir la libre circulation des personnes. L’application de ce principe d’égalité de traitement s’étend aux enfants, conjoint ou partenaire d’un ressortissant de l’un des États membres de l’Union européenne et aux bénéficiaires du statut de résident de longue durée dans un État de l’Union européenne ou aux personnes dont le père, la mère ou le tuteur légal bénéficie d’un tel statut.
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Les droits d’inscription - B - L’hypothèse risquée d’une augmentation des droits pour les seuls étudiants étrangers
II. Pour une plus grande reconnaissance et un meilleur accompagnement des enseignants-chercheurs dans l'ensemble de leurs missions
Chapitre II Les hypothèses d’évolution des droits d’inscription universitaires
III - Les implications des différentes modalités d’évolution des droits d’inscription universitaires
A - Une option à écarter : la suppression des droits
Actuellement, les droits d’inscription à l’université sont identiques quelle que soit la nationalité de l’étudiant. Les étrangers sont soumis aux mêmes droits d’inscription que les étudiants français pour les formations préparant aux diplômes nationaux à l’université.
La Cour a analysé une hypothèse d’évolution des droits d’inscription consistant à faire payer aux étudiants étrangers non ressortissants d’un pays de l’UE, de l’EEE ou de la Suisse des droits d’inscription d’un montant supérieur à celui des ressortissants français et de l’espace européen, y compris à l’université.
Les différentes pratiques au sein de l’OCDE
Au sein de l’UE, la Grèce, l’Irlande, la Lettonie, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, les Pays Bas, la Pologne, la République tchèque et le Royaume-Uni pratiquent la différenciation des frais de scolarité pour les étudiants étrangers. Pour les pays tiers de l’UE, la différenciation des droits est notamment mise en oeuvre au Canada, au Chili, au sein de la Fédération de Russie, en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Turquie. Aux États Unis, les étudiants étrangers sont redevables du même montant de droits d’inscription que les étudiants originaires d’un autre état que celui où est implanté l’établissement d’enseignement supérieur.
Comme en France, la pratique de droits d’inscription identiques pour les ressortissants nationaux et les étudiants étrangers est la règle en Allemagne, en Finlande, en Slovaquie, en Espagne, en Estonie, en Hongrie, au Luxembourg, au Portugal, en Slovénie, en Islande et en Norvège. Il est à noter que deux Länder allemands, le Bade-Würtemberg et la Rhénanie du Nord-Westphalie, ont récemment décidé d’instaurer le paiement de droits d’inscription d’un montant de 1 500 € par semestre pour les étudiants étrangers, alors que la gratuité s’applique aux étudiants nationaux et européens.
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Les droits d’inscription - A - Une option à écarter : la suppression des droits
II. Pour une plus grande reconnaissance et un meilleur accompagnement des enseignants-chercheurs dans l'ensemble de leurs missions
Chapitre II Les hypothèses d’évolution des droits d’inscription universitaires
III - Les implications des différentes modalités d’évolution des droits d’inscription universitaires
A - Une option à écarter : la suppression des droits
L’option d’une suppression des droits d’inscription universitaires peut paraître antinomique avec les développements relatifs au besoin de financement affiché par les acteurs de l’ESR. Cependant, dans la mesure où une telle option a pu être avancée dans le débat public, la Cour en a analysé les implications.
En première analyse, une telle mesure pourrait contribuer à l’atteinte des objectifs nationaux de l’enseignement supérieur. Elle concourerait, en particulier, à la réalisation d’un des objectifs formulé par la Stratégie nationale de l’enseignement supérieur (STRANES), consistant à « élever les niveaux de qualification » de la population en atteignant, d’ici 2025, « 60 % de diplômés de l’enseignement supérieur dans une classe d’âge (…) ».
Sur le plan financier, la suppression des droits d’inscription à l’université augmenterait le pouvoir d’achat des étudiants, qui enregistrerait un gain net équivalent aux droits acquittés (soit, pour 2018-2019, 170 € pour les étudiants inscrits en licence, 243 € pour les étudiants inscrits en master, etc.).
Sa mise en oeuvre par voie législative (une disposition en loi de finances permettant de modifier l’article 48 de la loi de finances du 24 mai 1951) permettrait une application immédiate, lors de la rentrée universitaire la plus proche.
Enfin, pour les établissements, la suppression des droits d’inscription permettrait un allègement des tâches administratives de détermination et de recouvrement des droits.
Cependant, un tel choix impliquerait un effort budgétaire additionnel conséquent pour l’État. L’hypothèse d’une gratuité totale des études universitaires, pour les formations conduisant aux diplômes nationaux, reviendrait à étendre à l’ensemble des étudiants le régime d’exonération appliqué actuellement aux seuls boursiers sur critères sociaux. Elle engendrerait un « manque à gagner » direct pour les universités correspondant aux recettes non perçues, évaluées à 342 M€, selon les estimations pour 2018-2019.
Une hypothèse de gratuité limitée aux cursus de licence générale priverait les universités de 174 M€ en 2018-2019 (cf. annexe n° 11). Cette piste impliquerait une compensation intégrale par l’État via les crédits du programme 150. Elle ferait supporter par son budget la quasi-totalité de la charge de financement des établissements. Le montant de la compensation serait renforcé par les effets du pic démographique prochain.
Enfin, une telle hypothèse est peu compatible avec le modèle français d’enseignement supérieur, comme le montrent les comparaisons internationales. La gratuité des droits est pratiquée dans plusieurs États européens, mais s’intègre dans des modes d’organisation et de financement de l’enseignement supérieur caractérisés notamment par une spécificité notable : une forte sélection pour l’accès à l’université.
Gratuité et sélection : les cas suédois et allemands
En Suède, en complément du niveau de connaissances générales sanctionné par un certificat de fin d’études secondaires, des exigences spécifiques (niveau en mathématiques, en langues, etc.) peuvent être imposées aux candidats à l’entrée dans les études supérieures. Si le nombre de candidats est supérieur au nombre de places disponibles, des critères de sélection supplémentaires sont utilisés pour choisir les candidats admis.
Si la gratuité à l’université est appliquée dans l’ensemble des Länder allemands depuis 2014-2015, les universités peuvent pratiquer la sélection dès lors qu’elles ont plus de demandes que de places ouvertes dans certaines filières. Dans ce cas, les établissements prennent en compte la moyenne obtenue à l’Abitur (le baccalauréat allemand) pour classer les candidats. Le modèle allemand de gratuité des études à l’université présente toutefois la caractéristique de s’appliquer à un nombre d’étudiants plus réduit qu’en France. Si l’obtention de l’Abitur est en principe le seul prérequis à l’entrée à l’université, seuls 55 % des élèves d’une génération obtiennent ce diplôme à la sortie de l’enseignement secondaire, contre 80 % pour le baccalauréat en France. Les élèves allemands inscrits dans des formations professionnelles dans le secondaire ne peuvent pas s’inscrire directement à l’université et n’ont accès qu’aux formations professionnelles du supérieur, dont la qualité permet en tout état de cause une bonne employabilité.
Ainsi, au vu des enseignements des modèles étrangers, l’hypothèse d’une gratuité totale des études devrait s’accompagner, dans le cas des universités françaises, de la mise en oeuvre d’une régulation renforcée dans l’accès aux études supérieures et/ou dans l’orientation des étudiants entre les filières, qui pourrait aboutir à laisser des effectifs importants sans parcours encore organisé vers l’insertion professionnelle.
Au regard de l’ensemble de ces considérations, l’option d’une suppression des droits d’inscription universitaires est à écarter. Elle ne paraît pas acceptable au plan financier et ne correspond pas au modèle français d’accès à l’enseignement supérieur.
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Les droits d’inscription - III - Les implications des différentes modalités d’évolution des droits d’inscription universitaires
II. Pour une plus grande reconnaissance et un meilleur accompagnement des enseignants-chercheurs dans l'ensemble de leurs missions
Chapitre II Les hypothèses d’évolution des droits d’inscription universitaires
III - Les implications des différentes modalités d’évolution des droits d’inscription universitaires
Dans ces conditions, la Cour a exploré des hypothèses très différentes de modulation des droits d’inscription, à partir du besoin de financement déclaré.
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Les droits d’inscription - 3 - La nécessité de prendre en compte les effets des politiques publiques
II. Pour une plus grande reconnaissance et un meilleur accompagnement des enseignants-chercheurs dans l'ensemble de leurs missions
Chapitre II Les hypothèses d’évolution des droits d’inscription universitaires
II - Un besoin de financement supplémentaire qui reste à mesurer
B - Une estimation fragile, qui ne tient pas compte des mesures d’efficience attendues en matière d’enseignement supérieur
3 - La nécessité de prendre en compte les effets des politiques publiques ainsi que les mesures d’efficience attendues dans la gestion des établissements
Le besoin de financement de l’enseignement supérieur ne résulte pas uniquement d’une application mécanique de la hausse du nombre d’étudiants. Les politiques publiques mises en place ou les mesures d’efficience dans la gestion des établissements ont une incidence sur son montant.
La croissance attendue du nombre d’étudiants résulte en partie de la politique visant à augmenter le niveau d’études et de diplomation de la population. C’est la Stratégie nationale de l’enseignement supérieur (2015) qui a fixé comme objectif d’atteindre 60 % de diplômés de l’enseignement supérieur dans une classe d’âge (50 % au niveau licence et 25 % au niveau master et 20 000 docteurs par an) d’ici 2025, « en regard de l’évolution des besoins de qualification du monde socio-économique, qui voit une augmentation importante du besoin en diplômés du supérieur, et de la tendance observée au niveau international. » La poursuite de l’objectif de porter à 60 % d’une classe d’âge les diplômés du supérieur induirait une augmentation supplémentaire de 460 000 étudiants en 10 ans.
Par ailleurs, la loi ORE prévoit des mesures destinées à améliorer le taux de réussite des étudiants, notamment en premier cycle. Il en est attendu un impact positif sur la réussite en premier cycle et, à terme, une réduction du coût de l’échec, qui peut être évalué à plus de 2 Md€ en 2015-2016128.
Dans son Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de juin 2017, la Cour a rappelé plusieurs pistes d’efficience dans la gestion de l’enseignement supérieur et de la recherche, concernant notamment les modalités d’allocation des moyens aux universités, les effets sur l’offre de formation des regroupements des établissements au sein des sites universitaires et la vie étudiante. Ces mesures pourraient participer à la consolidation de la situation financière des universités, qui n’est pas caractérisée par une situation de crise avérée, comme la Cour l’avait déjà relevé en 2015 dans son rapport sur l’autonomie financière des universités et comme le confirme l’évolution favorable de différents indicateurs financiers sur la période 2011-2017.
Évolution de la situation financière des universités
Dans le cadre de la présente enquête, la Cour a adressé à l’ensemble des universités un questionnaire d’ordre comptable et financier portant sur l’évolution des ressources propres (produits encaissables hors subvention pour charge de service public) entre 2011 et 2017. La Cour a choisi de limiter son champ d’analyse à la période allant de 2012 à 2017. Sur 63 réponses reçues, le nombre des déficits constatés a diminué, passant de 9 en 2016 à 6 en 2017 (dont un double déficit pour deux universités). Si le résultat net consolidé a diminué de 8,5 % (de 126 M€ en 2012 à 115,4 M€ en 2017), la capacité d’autofinancement consolidée s’est maintenue (+1,1 % entre 2012 et 2017, passant de 336,9 M€ à 340,7 M€). D’autres indicateurs financiers ont évolué favorablement sur la période, notamment le fonds de roulement consolidé (passé de 1 199 M€ en 2012 à 1 431 M€ en 2017), et la trésorerie nette, passée de 1 560,3 M€ en 2012 à 2 098,2 M€ en 2017 (+34,5 %).
Compte tenu de la diversité des paramètres participant au besoin de financement de l’enseignement supérieur (évolution de la demande d’éducation, efficacité dans la gestion des établissements, politiques publiques mises en place), le niveau du besoin financier ne peut faire l’objet d’évaluations suffisamment étayées. Si la Cour prend acte du besoin de financement déclaré par les acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche, elle ne peut, dans le cadre de la présente enquête, valider son niveau pour quatre raisons au moins : il ne fait l’objet d’aucune répartition indicative de la dépense, son mode de calcul est des plus sommaires, il ne tient pas compte du caractère momentané du pic démographique et n’intègre pas les efforts d’efficience qui restent à réaliser. L’évaluation du besoin se fonde ainsi sur des bases qui ne permettent pas de déterminer une cible de financement objective.
Le caractère incertain du calcul du besoin de financement de l’enseignement supérieur est d’autant plus dommageable qu’il ne permet pas d’appréhender, à partir d’arguments consolidés, le risque d’appauvrissement des universités mis en avant par la plupart des acteurs. L’accueil des étudiants, qu’il soit pratique ou pédagogique, induit des coûts qui restent à calculer.
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