Faut-il encourager l’alternance dans l’enseignement supérieur ?
Il existe deux types d’alternants: les « alternants sous statut scolaire et universitaire », qui bénéficient d’une convention de stage pour effectuer des périodes en entreprise, et les « alternants sous statut salarié », bénéficiant d’un CDD ou d’un CDI d’une durée de six mois à trois années selon les cas. Dans ce second cadre, deux possibilités existent. La première est l’apprentissage, qui est une forme d’alternance au sein de l’entreprise, sous la responsabilité d’un maître d’apprentissage.
Il donne lieu à un contrat d’apprentissage: le jeune est salarié et rémunéré selon un pourcentage du Smic ou du minimum conventionnel. À l’issue de cette formation (de un à trois ans, selon le niveau préparé), s’il a passé avec succès ses examens, l’apprenti reçoit un diplôme. La deuxième possibilité est la professionnalisation, qui associe sous la responsabilité d’un tuteur formation pratique et théorique, dispensée dans un organisme de formation externe ou interne à l’entreprise. La rémunération s’exprime également selon un pourcentage du Smic ou du salaire minimum conventionnel.
L’enseignement supérieur s’engage de plus en plus dans les formations en alternance
De plus en plus d’écoles de commerce s’ouvrent à l’apprentissage (l’Essec dès 1993). La formule adoptée le plus souvent est celle de la première année sous statut étudiant, puis les deux suivantes sous contrat d’apprentissage. Certaines écoles réservent un quota de places à l’apprentissage (Inseec, IECS Strasbourg devenue EM Strasbourg, etc.) – 130 diplômes d'ingénieur peuvent être préparés dans près de 80 établissements. La Commission du titre d’ingénieur (CTI), qui encadre le développement de l’apprentissage dans ces écoles, observe que les jeunes ingénieurs ainsi formés s’intègrent très facilement dans le monde économique. Il faut souligner que ce sont les écoles d’ingénieurs internes aux universités qui développent le plus la voie de l’apprentissage, ainsi que les licences professionnelles. Quant aux masters, le plus souvent, l’alternance est organisée en seconde année (M2). Parmi les universités les plus ouvertes à l’apprentissage, celle de Marne-la-Vallée offre plus de 60 diplômes professionnalisés préparés par cette voie. L’université d’Évry et celle de Metz s’y engagent résolument. Il est à souhaiter qu’elles fassent école.
Ce mode de formation offre un réel intérêt, tant pour les étudiants et l’entreprise, que pour l’université
L’apprentissage offre un accès aux savoirs par une pédagogie active, mais c’est aussi un parcours salarié qui permet de financer tout ou partie des études. Il ouvre ainsi des parcours inédits à des jeunes qui avaient peu de chances de s’insérer dans les cursus traditionnels de l’enseignement supérieur ; l’expérience professionnelle acquise plus tôt conforte la socialisation du jeune dans l’entreprise et permet une insertion professionnelle plus rapide. Pour nombre d’étudiants, il se présente également comme une deuxième chance, pendant que l’entreprise apprend à mieux connaître le monde universitaire et développe des coopérations fructueuses. Enfin, pour l’université, l’apprentissage est un moyen de diversifier ses ressources financières (taxe d’apprentissage), mais aussi de modifier et d’enrichir ses pratiques pédagogiques, de développer le travail en équipe, de multiplier les relations avec le tissu économique, y compris en contribuant aux transferts de technologies, et de bâtir de bons projets de recherche.
Certains freins, comme des difficultés d’ordre juridique, empêchent le développement de l’apprentissage dans l’enseignement supérieur. En effet, il n’existe pas de code du travail – sauf exception – pour les formations supérieures. Par exemple, si les étudiants peuvent redoubler la première année d’une formation en deux ans, les apprentis ne peuvent redoubler que l’année terminale. Enfin, les formations par apprentissage dans le supérieur sont en général plus coûteuses que celles du niveau V ou IV. Des choix sont donc à effectuer, notamment par les Régions, dans les priorités d’affectation des budgets relatifs à l’apprentissage.