Publication d'un nouveau travail de recherche sur les jeunes
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"Les jeunes d'aujourd'hui: quelle société pour demain?". Télécharger
la synthèse.
Chapitre 1 - Etre jeune: un temps, un mode de vie pleinement assumés
Les jeunes de qui parle-t-on? C’est au début du XXe siècle que la sociologie découvre son intérêt pour la jeunesse. Définie comme période qui s’insère entre l’adolesce nce et l’âge adulte, la jeunesse constitue cette phase intermédiaire pendant laquelle se joue la socialisation de l’individu. Ce qui explique son importance sociétale et l’intér êt que lui portent les autorités publiques. Cependant, si l’on souhaite établir une photographie fidèle à la réalité de ce que pourraient être « les jeunes », l’analyse se heurte à une multitude d’approches possibles recouvrant des réalités sociales aussi variées qu’hétérogènes: parmi les jeunes, certains sont diplômés du supérieur, d’autres sont sortis du système scolaire sans diplôme, certains sont en couple et ont des en fants, d’autres sont célibataires, certains sont cadres, d’autres ouvriers ou étudiants. Ainsi, « les jeunes » apparaissent sous un visage d’identités multiples directement tributaires des évolutions sociétales qui les affectent. La définition que l’on peut donner « des jeunes » change avec son époque. Une piste d’analyse est de prendre en considération les différentes étapes d’entrée dans le vie adulte. Nos analyses montrent que la tranche d’âge 18-29 ans se révèle une approximation satisfaisante des contours de la jeunesse, permettant de mettre en évidence la spécificité et l’originalité de cette période du cycle de vie. Pleinement revendiquée, cette période de la vie s’est allongée et n’est plus seulement un temps d’attente et d’aspiration à une vie d’adulte.
La politique autrement: les nouveaux rapports des jeunes à la politique L’idée reçue selon laquelle les jeunes ne s’intéres seraient plus à la politique ne semble pas se confirmer. Ils entretiennent plutôt un rappo rt différent à la vie publique, fait notamment de pratiques nouvelles d’engagement et de l’investissement de valeurs telles que le libéralisme en matière de mœurs, le changement sociétal, l’ouverture au monde et le rejet des discriminations, conjuguées à une cert aine sensibilité à l’environnement. Ils valorisent l’individualité et la liberté de choisir ses relations et ses thèmes d’action, prennent leur distance avec les formes de participations politiques traditionnelles (partis politiques, syndicats) et sont assez défiants vis-à -vis des institutions politiques. Les attitudes des jeunes indiquent le sens dans lequel la société est en train de se développer: les idéologies se dissipent, les pistes d’identification politique conventionnelles se dissimulent derrière des pratiques d’engagement protéiformes. En somme, on est face à une génération libérale en mat ière de mœurs, mais attentive à la nécessité de la régulation sociale en termes d’injustice générée par les inégalités économiques dont les jeunes sont les premières victimes.
Chapitre 2 - Etre jeune : un consommateur actif
La consommation des jeunes d’aujourd’hui et les quadras demain Les revenus des jeunes de 18-29 ans sont en moyenne plus faibles que ceux de leurs parents au même âge alors que leur niveau moyen de diplôme a nettement progressé (70% de bacheliers pour les jeunes générations cont re seulement 20% dans la génération « Mai 68 »). Les contraintes économiques qu’ils subissent (des dépenses contraintes de logement plus élevées au même âge, et leurs moindres revenus) les ont conduits à développer des comportements stratèges: plus de soldes, promotions, comparaisons de prix, recherche de prix bas, accès aux offres low cost. Enfants de générations aux valeurs d’hédonisme fortes, ils arbitrent en faveur des loisirs, de la restauration, de l’hôtellerie mais aussi de la comm unication. Sur ces différents postes, leur niveau de dépenses est plus élevé que celui des générations précédentes. En contrepartie, leurs dépenses en alimentation sont faibles et sont utilisées comme variables d’ajustement. Les jeunes d’aujourd’hui consomment plus au même âge que les générations précédentes, ils jouent donc un rôle primordial dans la consommation. C’est au travers d’un choix de marques, d’enseignes affic hant des engagements, que les jeunes peuvent s’exprimer et affirmer leur identité. Ils recherchent du lien social mais affirment aussi leurs valeurs dans leur consommation. En quête de sens, ces jeunes générations développeront de nouvelles formes de co nsommation en préférant l’usage à la possession. L’autopartage, le co-voiturage, le développement des secondes vies des objets, la location, les achats groupés sont autant de nouvelles formes de consommation qui se développeront, à l’aide d’internet, dans une conjoncture économique difficile...
Chapitre 3 - Etre jeune : une grande précarité
L’accès au logement : un passeport pour l’insertion des jeunes Dans l’ensemble, les jeunes Français sont plus fréq uemment en situation de logement autonome que leurs voisins européens (près des deux tiers des moins de 30 ans, contre moins de la moitié en moyenne dans les 27 pays européens). Cependant, une analyse plus fine des données disponibles montre que la sit uation de logement des jeunes est moins favorable lorsque ceux-ci sont au chômage ou en emploi précaire. Au-delà des réticences des bailleurs privés à proposer des loge ments à des publics moins solvables et plus mobiles que la moyenne, il s’avère que le parc social est de moins en moins ouvert aux jeunes, tandis que les aides financières, globa lement en baisse et peu ciblées sur les publics jeunes, ne permettent pas de compenser les hausses de loyer. Les dispositifs d’accompagnement sont trop morcelés et insuffisamment réactifs, pour des jeunes qui n’ont pas le temps d’attendre. Les jeunes face à l’insertion professionnelle: un passage obligatoire par la précarité? Si la précarité de l’emploi, qui touche de plus en plus sévèrement un nombre croissant de jeunes, peut apparaitre comme une fatalité, il semblerait que l’instabilité professionnelle soit davantage un passage obligé inhérent à un processus d’insertion par tâtonnements. En effet, malgré des contacts rapides et répétés av ec le marché du travail, les jeunes ne se stabilisent que progressivement dans l’emploi, et ce dans les premières années qui suivent leur sortie de formation. Les diplômés, les apprentis, ainsi que les jeunes issus de filières spécialisées semblent s’insérer plus rapid ement. Pour les autres, moins diplômés et plus éloignés de l’emploi, des dispositifs exist ent mais ne sont pas toujours visibles, et n’ont pas encore fait la preuve de leur efficacité. De nouveaux dispositifs en projet pourraient cependant permettre de remédier à ces in suffisances, à condition qu’ils soient bien articulés à ceux qui existent déjà, afin d’éviter l’effet « mille-feuille » tant décrit et décrié.
2.3.3. Le développement des formations professionnelles et de l’alternance Le développement des formations professionnelles et en alternance repose sur le constat de la réussite de l’insertion des apprentis notamme nt, et le reproche récurrent du caractère trop théorique des cursus classiques, qui seraient éloignés du monde de l’entreprise et de ses besoins. Dans les filières p rofessionnelles, la formation en alternance en particulier apparaît comme un outil pertinent po ur former des jeunes tout en leur permettant d’acquérir une expérience professionnell e et la connaissance du monde du travail.
2.3.3.1. L’alternance: contrat d’apprentissage et contrat de professionnalisation Deux types de contrat sont proposés aux jeunes pour se former en alternance: le contrat d’apprentissage, destiné principalement aux jeunes âgés de 16 à 25 ans, et le contrat de professionnalisation, destiné également aux jeunes de 16 à 25 ans, ainsi qu’aux adultes d’au moins 26 ans, demandeurs d’emploi, bén éficiaires du RSA, en contrat aidé. Le contrat de professionnalisation, s’est substitué aux anciens contrats en alternance: contrats de qualification jeunes et adultes, contra t d’adaptation et contrat d’orientation.
L’apprentissage s’est fortement développé au cours des années 90. En 1992, plus de 125 000 jeunes sont entrés en apprentissage. Cet effectif culmine en 2008, pour atteindre 299 000 entrées. L’année 2009 est marquée par un lé ger recul des entrées en lien probable avec le recul de l’activité économique, et la difficulté, pour les jeunes, à trouver une entreprise d’accueil. Le nombre de nouveaux con trats enregistrés dans le secteur marchand se stabilise à 287 000 en 2010. Le secteur public recrute quant à lui de plus en plus d’apprentis, mais, avec 7 800 entrées en 2011, l’apprentissage y reste marginal. Les entrées en contrats de professionnalisation aug mentent quant à elles régulièrement, surtout dans le tertiaire et l’industrie.
Les nouveaux apprentis sont plus âgés et mieux formés en moyenne qu’auparavant. Cette évolution s’explique surtout par le développement d es formations préparant à un diplôme de niveau Bac, à la suite de la réforme du baccalau réat professionnel en 2009 (qui se prépare désormais en trois ans au lieu de quatre précédemment). Le niveau de formation des personnes qui entrent en contrat de professionn alisation augmente également ces dernières années.
2.3.3.2. Lever les freins au développement de l’apprentissage Un des principaux freins au développement de l’appr entissage est le nombre important de ruptures dans les contrats de travail et, par consé quent, de fréquents abandons en cours de formation. Ces ruptures s’expliquent notamment par une mauvaise orientation du jeune, une capacité d’accueil ou de tutorat insuffi sante dans l’entreprise, les éventuels conflits et difficultés d’adaptation des apprentis au monde du travail, le mauvais dimensionnement des tâches confiés à l’apprenti. Enfin, certains apprentis connaissent des conditions de vie difficiles: le lieu de travail peut être très éloigné de celui du centre de formation, ce qui oblige le jeune à trouver deux solutions d’hébergement.
L’extension de l’apprentissage se heurte également à la limite du nombre de places disponibles dans les entreprises. Pour favoriser la signature de contrats d’apprentissage, le plan d’urgence pour l’emploi prévoyait une suppress ion des charges sur la rémunération des apprentis pour les entreprises de plus de 10 sa lariés, ainsi que des primes à l’embauche. Ces mesures, initialement prévues pour l’année 2009, ont été prolongées jusqu’au 31 décembre 2010. Depuis, des nouvelles mesures visent à développer l’alternance. Elles ont permis de limiter la baisse des entrées e n apprentissage au cours du deuxième semestre 2009, sans parvenir à le relancer en 2010. Par ailleurs, la mise en place des « développeurs de l’apprentissage » a pour objectif de démarcher les entreprises afin de promouvoir l’apprentissage et de permettre la signature de contrats.
La réflexion gouvernementale pour le développement de l’apprentissage est en cours. Des réformes sont envisagées: la mise en place de « bo nusmalus » pour les entreprises selon un quota d’apprentis, une amélioration des conditions d’accompagnement et de tutorat des jeunes, la prise en compte de leurs difficultés de logement font partie des pistes de réflexion envisagées par le gouvernement sortant et qui seront très probablement revisitées par le nouveau gouvernement.
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