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Formation Continue du Supérieur
3 décembre 2018

Les droits d’inscription - Chapitre I - CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS

Cour des ComptesLes droits d’inscription dans l’enseignement supérieur - Cour des comptes - Communication à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale • Novembre 2018
Chapitre I - CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
Comme plusieurs autres pays européens, la France a fait le choix historique et structurant d’un système public d’enseignement supérieur dont le financement est assuré à près de 80 % par des fonds publics.
En termes de politique publique, les droits d’inscription ne sont considérés ni comme un levier de financement, notamment pour les universités, ni comme un instrument de régulation de l’accès aux études supérieures ou aux différentes filières de formation. Non seulement le mode de fixation des droits par voie d’arrêtés interministériels n’a pas évolué depuis 1951, mais leur nature juridique reste indéterminée et leur niveau ne correspond à aucune logique identifiable. En application du principe constitutionnel de gratuité, les droits d’inscription pour la préparation d’un diplôme national ont longtemps été fixés à un niveau si modique que le service public de l’enseignement supérieur pouvait être considéré comme quasiment gratuit. De ce fait, ce niveau est encore aujourd’hui, dans la majorité des établissements, sans commune mesure avec le coût des formations.
Les droits d’inscription ne peuvent donc pas être considérés comme un levier de financement significatif, notamment au niveau des universités, d’autant qu’un nombre élevé d’étudiants sont exonérés du paiement des droits.
La quasi-gratuité date cependant d’une période où l’enseignement supérieur concernait une fraction marginale de la population. Alors que le contexte a depuis lors considérablement évolué, compte tenu de la massification de l’enseignement supérieur et de son internationalisation, les pouvoirs publics ne sont pas revenus sur ce principe ancien. Néanmoins, un mouvement de différenciation est à l’oeuvre depuis plusieurs années. Les droits d’inscription sont désormais de plus en plus considérés comme des instruments financiers permettant d’améliorer les ressources des établissements, même si c’est à des degrés très divers au sein de l’enseignement supérieur public.
Dans les modèles atypiques de l’institut d’études politiques (IEP) de Paris et de l’université Paris-Dauphine, la stratégie de croissance, y compris à l’international, s’est appuyée sur une augmentation dynamique des ressources propres, et notamment des droits d’inscription. Le dispositif original de modulation en fonction du revenu paraît difficilement reproductible dans l’ensemble de l’enseignement supérieur, et en particulier à l’université, en raison des spécificités de ces deux établissements. Sa mise en place a dû être accompagnée de mesures de soutien financier en faveur des étudiants : à Sciences Po, ces mesures, couplées au programme d’égalité des chances, se sont traduites par un accroissement de la part des boursiers dans l’effectif étudiant, mais elles n’ont pas permis de corriger l’effet d’éviction, parfois constaté à l’égard des élèves non boursiers correspondant aux premières tranches du barème des droits.
Dans d’autres types de formation, les droits liés à la scolarité peuvent tendre vers des niveaux destinés à couvrir le coût complet de mise en place du cursus. Ces montants élevés de droits, lorsqu’ils compensent un niveau de financement public faible (cas de certaines filières paramédicales suivies dans des instituts), alourdissent la charge financière reposant sur les étudiants et conduisent nombre d’entre eux à effectuer leur formation à l’étranger. Dans le cas des diplômes d’université, le niveau élevé de droits tire parti d’un public spécifique (les recettes, même s’il ne s’agit pas de leur visée première. S’ils ne concernent actuellement qu’un nombre réduit d’étudiants, la prolifération de ces DU appelle la mise en place d’un dispositif de suivi de la part du ministère chargé de l’enseignement supérieur, concernant tant la qualité des formations dispensées que leur équilibre économique.
Dans une moindre ampleur, au sein des écoles d’ingénieurs publiques, un mouvement, non coordonné entre les tutelles ministérielles, de progression des droits d’inscription s’est fait jour plus récemment, dans un contexte de stagnation ou de diminution des subventions pour charges de service public. Les augmentations substantielles, intervenues sur une période rapprochée, sont également à relier aux spécificités de ces écoles : des formations sélectives, de bonnes performances en termes d’insertion professionnelle, une situation sociale des étudiants en moyenne plus aisée que la moyenne française et un nombre limité d’étudiants. Mais ces évolutions non coordonnées aboutissent aujourd’hui à des disparités injustifiées de droits entre des formations parfois de même nature, qui rendent indispensable un renforcement de la coordination interministérielle.
Au terme de cette analyse, il apparaît que les montants des droits d’inscription varient sensiblement au sein de l’enseignement supérieur public. Si la grande majorité des étudiants acquittent des droits modiques dès lors qu’ils visent l’obtention d’un diplôme national dans une université, un nombre de plus en plus significatif d’entre eux doit s’acquitter de droits qui ne relèvent pas de la même logique. Il en résulte un écart croissant entre les modèles économiques des établissements qui utilisent les droits comme leviers financiers et les universités. Il en résulte également un effet de dispersion mal justifié et peu compréhensible pour les étudiants et leurs familles, qui nécessite qu’au minimum un certain nombre de mesures soit prises pour renforcer la cohérence du cadre actuel des droits d’inscription, piloter la différenciation et améliorer la lisibilité du système pour les usagers et les établissements d’enseignement supérieur publics.
Au vu de ces constats, la Cour, en vue de renforcer la transparence, la lisibilité et la cohérence du cadre actuel des droits d’inscription dans l’enseignement supérieur public, formule les recommandations suivantes :
1. (MESRI et autres ministères exerçant la tutelle d’établissements d’enseignement supérieur public) : établir une stratégie des droits d’inscription coordonnée au niveau interministériel, impliquant notamment la co-signature par le ministère chargé de l’enseignement supérieur de tous les arrêtés de fixation du montant des droits ;
2. (MESRI et autres ministères exerçant la tutelle d’établissements d’enseignement supérieur public) : doter les pouvoirs publics des outils et procédures permettant une connaissance plus fine des droits d’inscription et de leurs déterminants ;
- présenter dans les documents budgétaires, et notamment dans le rapport sur les politiques nationales de recherche et de formations supérieures, une vue d’ensemble sur le niveau des droits d’inscription dans la totalité des établissements d’enseignement supérieur publics et sur les recettes financières issues des droits d’inscription aux diplômes nationaux et aux diplômes d’établissement ;
- intégrer le thème des droits d’inscription de l’ensemble de l’enseignement supérieur dans une publication régulière du MESRI ;
- évaluer les impacts sur le profil des étudiants des augmentations récentes de droits d’inscription aux écoles d’ingénieurs publiques ;
- généraliser la démarche de calcul des coûts complets des formations, sur une base harmonisée, à l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur public.
3. (MESRI, HCERES) : effectuer un recensement des diplômes d’université, assorti pour chacun d’entre eux d’un état financier, et intégrer ces informations dans le cadre du dialogue de gestion avec les universités ;
4. (MESRI et autres ministères exerçant la tutelle d’établissements d’enseignement supérieur public) : régulariser, d’ici fin 2019, le fondement juridique des droits d’inscription aux concours des écoles d’ingénieurs publiques.
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