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Formation Continue du Supérieur
25 mars 2016

Les fusions d’universités et la documentation dans le Rapport annuel de l'Inspection générale des bibliothèques 2015

En 2015, dans le cadre de son programme fixé par lettre de mission des ministres de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et de la culture et de la communication, l'Inspection générale des bibliothèques (IGB) a exercé sa mission d'évaluation et de contrôle auprès de 7 sites ou établissements d' enseignement supérieur, de 18 bibliothèques de collectivités territoriales. Rapport de l'Inspection générale des bibliothèques.

Rapport coordonné par Pierre Carbone avec le concours de Dominique Arot, Joëlle Claud, Jean-Luc Gautier- Gentès, Hélène Richard, Yves Alix, Thierry Grognet et Charles Micol
Le rapport est consultable à l’adresse : http://cache.media.enseignementsuprecherche. gouv.fr/file/2015/72/0/Les_fusions_d_universites_et_la_documentation_201506018_444720.pdf
Les évolutions de l’enseignement supérieur et de la recherche depuis une dizaine d’années ont conduit les services communs de la documentation (SCD) à coopérer plus fortement, au niveau national comme à l’échelle des sites. Ce travail en commun prend une dimension nouvelle dans le cas d’une fusion d’universités, qui modifie profondément l’organisation et le fonctionnement même de ces services et constitue une démarche globale, engageant tous les personnels et toutes les activités des universités concernées. Il ne s’agit pas ici d’isoler la fonction documentaire dans ce mouvement, mais de voir de quelle façon elle peut l’accompagner (voire la préfigurer) pour améliorer les services rendus aux publics.
Même si des disparités de tous ordres (historique, taille des établissements, champs disciplinaires, nombre de sites, etc.) distinguent les différentes situations, on peut tirer des fusions déjà réalisées à Aix-Marseille, Bordeaux, en Lorraine et à Strasbourg de premières conclusions, qui soient utiles tant pour la suite du processus dans ces universités que pour celles qui s’engagent dans cette démarche. On distingue d’ailleurs deux étapes dans la fusion, la première étant la préparation et la mise en place de la nouvelle structure, et la seconde étant une période de consolidation du processus se poursuivant sur plusieurs années.
La préparation de la fusion a conduit partout à mettre en place des comités de pilotage et des groupes de travail fonctionnels ou thématiques, auxquels les SCD ont été associés de façon inégale selon les cas, sur la base d’un mandat clair ou de façon plus informelle, parfois sous la forme de groupes de travail spécifiques. De façon générale, que des groupes de travail dédiés soient mis en place ou non, il convient de veiller au pilotage politique de la documentation, d’articuler politique et technique, et de lier la question de la fusion des services de documentation aux orientations stratégiques en matière de formation et de recherche. En effet, avant de mettre au premier plan la question des organigrammes et des regroupements de services, il s’agit d’impulser, y compris au niveau documentaire, une démarche de projet : la fusion des services de documentation doit être guidée par un projet stratégique à l’échelle des universités en voie de regroupement, et les processus administratifs ou techniques engagés en matière de documentation doivent avoir pour perspective l’amélioration des services rendus à la communauté universitaire.
Au plan statutaire, deux modèles ont été adoptés dans les universités fusionnées, celui de SCD et celui de direction de la documentation (éventuellement élargie à d’autres fonctions, telle l’édition). Les avantages du statut de SCD, qui devrait être le modèle préférentiel et conforme à la réglementation, tiennent notamment au fait que lui est clairement reconnue une mission de coordination de l’ensemble des ressources documentaires, ainsi qu’au pilotage par un conseil documentaire associant les enseignants-chercheurs et les étudiants. Dans le cas où l'option choisie est celle d'une direction de la documentation, il convient de la doter d'un texte réglementaire précisant ses missions, en particulier à l'égard des bibliothèques ne relevant pas de son autorité directe (c'est-à-dire les bibliothèques dites associées dans le cas d'un SCD).
D’une manière générale, à l'occasion des fusions, les structures documentaires se sont quelque peu éloignées du politique et du scientifique pour se rapprocher de l’administratif et du technique. Le lien avec le politique et le scientifique étant vital pour la fonction documentaire, il convient de le garantir en prévoyant d’inviter à titre permanent le directeur au conseil académique, à la commission de la recherche et à la commission de la formation et de la vie universitaire, en invitant le directeur à présenter une fois par an au conseil d’administration un rapport sur la politique documentaire, et en désignant auprès du président un interlocuteur pour la documentation (vice-président ou chargé de mission).
Concernant les évolutions d’organigramme, les fusions ont conduit, mais de manière encore modeste, à organiser le fonctionnement des comités de direction (essentiellement avec un périmètre élargi) et à développer des fonctions transversales (parfois dans le cadre d’une organisation matricielle croisant responsabilités transversales et sectorielles). Il est nécessaire de veiller à l’évolution des cadres entre les anciennes structures et la nouvelle après fusion : des directeurs ne le sont plus, des responsables de département peuvent ne plus l’être, les responsabilités peuvent changer pour l’ensemble des cadres. Il faut en particulier être vigilant concernant l’évolution de poste des anciens directeurs, sans pour autant diluer les responsabilités du nouveau directeur. S’il s’agit de redéfinir les compétences en portant toute l’attention méritée au facteur humain, l’organigramme ne peut être durable que s’il est commandé par une logique fonctionnelle.
En dehors des fonctions administratives et comptables, la rationalisation de la gestion documentaire proprement dite est encore à l’état de la réflexion ou du projet, ce qui nécessite d’engager une deuxième étape de consolidation de la fusion, allant au-delà de simples ajustements. En effet, une des démarches à engager très tôt - dans l’idéal, avant la fusion - consiste à analyser les emplois et à redéfinir les fonctions et les métiers dans le cadre nouveau, à identifier et développer les fonctions transversales et scientifiques (telles le numérique, les archives ouvertes, la bibliométrie…) nécessitant des compétences de haut niveau regroupées à l’échelon central. Il s’avère que l’harmonisation des pratiques et la mise en place de nouveaux processus communs à la nouvelle structure ne peuvent se faire qu’en encourageant les échanges au sein du SCD et le brassage avec les autres services de l’université fusionnée, en développant une culture commune qui renforce le sentiment d’appartenance chez tous les personnels.
Un des axes majeurs pour permettre cette harmonisation des pratiques est d’adopter une démarche orientée usagers, et d’avoir pour objectif principal l’amélioration des services aux publics. Au premier chef, il s’agit d’harmoniser et élargir les horaires d’ouverture, en envisageant cette question de manière concertée très en amont de la fusion, en ayant pour objectif pour les sites les plus importants d’avoir au moins une bibliothèque ouverte tard le soir et le dimanche, en tentant des expériences limitées dans le temps et en se donnant les moyens de les évaluer. Cela demande de tenir compte des rythmes d’activité de l’université (préparation des partiels, examens, période estivale) et de ne pas négliger la coordination avec les bibliothèques territoriales. De même, il est utile de développer les outils de communication pour faire connaître les nouveaux services mutualisés et de s’inspirer des réussites des bibliothèques des collectivités territoriales (communication, signalétique urbaine, automatisation du prêt, boîtes de retour des documents, etc.). Il est nécessaire également de simplifier les procédures pour les usagers, et autant que possible de donner aux lecteurs les mêmes droits au sein de l’ensemble des bibliothèques de l’université. Par ailleurs, si l’accès à la documentation électronique a été généralement harmonisé, le développement de services nouveaux est souvent à l’état de réflexion.
Un autre axe majeur est la formalisation d’une politique documentaire dans le cadre nouveau. Elle est en partie liée au caractère pluridisciplinaire ou non de chacune des universités avant la fusion et à l’existence de formations communes. Elle repose sur une connaissance fine des collections, du SCD, de l’université et des bibliothèques proches, partenaires ou non, et sur la mise en oeuvre des axes stratégiques de l’université par rapport à l’enseignement, la recherche et la vie étudiante.
Cette politique unifiée donne une dimension nouvelle au patrimoine documentaire, car l’importance des bibliothèques des universités fusionnées leur confère des possibilités et des responsabilités plus grandes en matière de patrimoine, actuel ou à venir, au sein de la communauté universitaire, tout comme en matière de bibliothèque numérique ou de conservation au sein de leur environnement régional. Elles doivent jouer tout le rôle qui est désormais le leur dans leur région comme à l’échelle nationale ou européenne.
Au plan budgétaire, pour la mise en oeuvre de cette politique documentaire, la fusion des universités a entraîné une réorganisation des circuits d’acquisition. Les marchés d’acquisition d’ouvrages et d’abonnement aux périodiques papier comme les contrats pour la fourniture de la documentation électronique ont dû être renégociés et ce travail peut s’avérer d’une grande ampleur. En tout cas, cela oblige les SCD à réorganiser leurs services transverses, administratifs entre autres. Cette centralisation doit également jouer dans l’indispensable resserrement de la bibliothèque autour de ses fonctions communes. Gestion des crédits documentaires et organisation des circuits de décision concernant les acquisitions constituent donc un élément important du pilotage des nouveaux SCD et de la construction de leur identité partagée.
Par ailleurs, les autres bibliothèques dans l’université ne doivent pas être laissées à l’écart de la démarche, et compte tenu du risque de dispersion au sein d’établissements de cette dimension, la priorité est de mettre en commun et de mettre à jour une carte complète des ressources documentaires de l'université, sous forme de liste mais également sous une forme cartographique. De façon générale, l’ensemble des lieux documentaires est susceptible d’adaptation aux besoins dans le contexte nouveau, et il est judicieux de profiter des opportunités offertes par la fusion pour opérer des regroupements dans le cadre d’une carte des services documentaires en synergie avec la carte des formations et de la recherche.
Pour ce qui est des systèmes d’information documentaire, les situations dépendent étroitement de l’existant, deux des quatre universités fusionnées étant déjà équipées du même système avant la fusion. L’expérience des deux autres universités fusionnées montre qu’il faut anticiper la fusion en adoptant en amont un système unique ou à défaut une solution simple, susceptible de raccourcir les délais de mise en oeuvre d’un système unique, de façon à proposer aux utilisateurs un portail donnant accès de façon simple à l’ensemble des ressources.
La fusion est donc un processus long, qui se poursuit au-delà de la mise en place des nouvelles structures, mais elle peut être facilitée en mettant au premier plan une dynamique de projet dans le souci d’améliorer les services aux usagers. Pour la fonction documentaire, les questions-clés sont : le lien avec les orientations stratégiques de l’établissement en matière de formation et de recherche, la coordination de l’ensemble des ressources documentaires de l’université fusionnée, qu’elles soient ou non gérées directement par le SCD, la redéfinition des métiers et des fonctions dans le cadre nouveau au bénéfice de fonctions transversales et de nouvelles compétences, l’harmonisation et l’amélioration des services aux publics, la formalisation et la mise en oeuvre d’une politique documentaire unifiée ayant un volet patrimonial et s’accompagnant d’une réorganisation des circuits d’acquisition, l’encouragement à des regroupements pertinents par l’adoption d’une nouvelle carte des services documentaires en synergie avec la carte des enseignements et de la recherche, la mise en oeuvre le plus tôt possible d’un système d’information unique et d’un portail. L’avancée de ces chantiers étant forcément inégale au cours du temps, il convient de se doter également des instruments de pilotage et d’évaluation pour garantir leur pleine réalisation. Voir l'article...
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