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Formation Continue du Supérieur
10 avril 2013

Quelques repères pour comprendre la réforme de la formation des enseignants

Universités & TerritoiresSur le site http://www.universites-territoires.fr/, le n°92 d'Universités & Territoires est disponible.
Par Olivier Rey Responsable du service Veille et Analyses de l’Institut Français de l’Éducation (IFÉ). Quelques repères pour comprendre la réforme de la formation des enseignants (page 21-22 du n°92 d'Universités & Territoires)
Contrairement à ce qu’avait un peu rapidement annoncé l’ancien Président de la République, les 32 Instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) existent encore aujourd’hui. Certes, leur poids a été considérablement réduit en 2005, quand ils sont devenus une simple école interne » à l’université à laquelle un décret les a rattaché. Néanmoins, ils ont encore des directeurs, des personnels, des enseignants et des formateurs affectés et coordonnent, au moins administrativement, ce qui reste de la formation des enseignants après les réformes du précédent quinquennat. Ces moyens seront d’ailleurs transférés dans le cadre des nouveaux établissements qui seront mis en place à la rentrée.
Concomitante de l’annonce des 60 000 postes enseignants créés sur cinq an, la création des Écoles Supérieures du Professorat et de l’Éducation (ESPÉ) pour la rentrée 2013 illustre en effet la refondation de la formation des enseignants souhaitée par les ministres Vincent Peillon et Geneviève Fioraso. Pour les néophytes, c’est un sigle de plus dont on voit parfois mal ce qu’il recouvre.
Sans rentrer dans les détails techniques ou politiques (dont certains sont encore en discussion actuellement dans la loi de refondation de l’école), comprendre ce qui se joue dans les ESPÉ nécessite en fait un bref retour en arrière. Pour de nombreux acteurs académiques français, en effet, la vision de la formation des enseignants est encore largement structurée par ce qu’ils ont connu pendant de nombreuses années où formation des maîtres du primaire et formation des enseignants du secondaire étaient soigneusement distinguées.
Du côté des « instits », il y avait les fameuses écoles normales disséminées dans tous les départements de France et, dans l’imaginaire collectif, très liées à la communale de Jules Ferry. Même si, en fait, des milliers d’instituteurs et d’institutrices on été recrutés sur le tas, sans passer par les écoles normales, ces dernières ont joué un rôle important pour diffuser des valeurs et une culture professionnelle où la qualité et l’innovation pédagogique pouvaient voisiner sans encombres. En revanche, les écoles normales restaient l’affaire de l’administration de l’éducation nationale, des rectorats et des inspections académiques, bien loin des universités.
Ces dernières préféraient en effet s’occuper de la préparation aux concours d’enseignement pour le second degré, tels que le CAPES et l’agrégation, dont les contenus étaient pour l’essentiel disciplinaires. Imaginés d’abord pour le lycée de l’élitisme républicain, ces concours reposaient sur le postulat qu’une bonne maîtrise d’une discipline classique suffisait pour savoir enseigner.
Avec la création des IUFM au début des années 90, Lionel Jospin entend faire converger la formation des professeurs et des instituteurs (devenus professeurs des écoles) pour prendre en compte aussi bien les modifications sociologique des populations scolaires que les résultats des recherches internationales sur l’éducation.
Celles-ci convergent en effet pour affirmer qu’une formation des enseignants de qualité nécessite d’associer des savoirs professionnels, didactiques et pédagogiques aux savoirs disciplinaires, car enseigner est un métier qui s’apprend et pas seulement une déclinaison en classe des leçons apprises à l’université. Elles plaident ensuite pour un rapprochement entre les instituts de formation des enseignants et les universités, afin que tous les étudiants bénéficient d’une formation proche de la recherche, garante de l’actualisation des savoirs et d’une démarche plus « réflexive » sur leurs propres pratiques et connaissances.
Une grande part de ces idées vont néanmoins être altérées voire dissoutes dans les négociations conflictuelles entre ceux qui veulent préserver la chasse gardée des universités sur la préparation des concours et ceux qui voudraient étendre la logique des anciennes écoles normales à l’ensemble des enseignants. Il ne faut pas oublier que pour de nombreux départements universitaires, la préparation aux concours est la seule garantie d’avoir un public étudiant en nombre suffisant pour justifier du maintien de certaines filières!
Les IUFM sont donc les enfants parfois un peu claudicants de compromis qui ne satisfont personne. S’ils se mettent en place et fonctionnent bon an mal an jusqu’à aujourd’hui, ils souffrent perpétuellement de critiques qui culminent lors du quinquennat de Nicolas Sarkozy, puisqu’une partie de l’ancienne majorité en fait le symbole de toutes les errances pédagogiques souvent fantasmées de l’éducation post-68.
Les nouvelles ÉSPÉ sont le fruit de cette histoire qu’elles sont censées dépasser. D’une part elles consacrent le fait que la formation des enseignants ne peut pas être laissée à un apprentissage « sur le tas », qu’il y a des savoirs professionnels qui doivent se transmettre et qu’ils ne se réduisent pas à trois techniques de maintien de l’ordre dans la classe ajoutées aux savoirs disciplinaires classiques. C’est le sens des 5 blocs de compétences qui composeront les « Masters » d’enseignement que tout futur enseignant devra suivre: bloc disciplinaire, bloc didactique, bloc contexte d’exercice du métier, bloc recherche et bloc mise en situation professionnelle.
D’autre part, elles seront étroitement reliées aux universités sans y être diluées: les ÉSPÉ ont vocation a être le fruit de consortiums entre acteurs de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, qui s’organisent pour proposer une offre de formation à tous les métiers ayant une dimension éducative. C’est pourquoi il a été évoqué la possibilité de développer des Masters vers la santé, le social, la formation professionnelle ou tout autre secteur, même si le coeur des ÉSPÉ sera bien évidemment la formation des enseignants de l’éducation nationale (enseignement supérieur compris).
En revanche, le découplage entre partie « théorique » et partie « pratique » de la formation risque de perdurer en grande partie, par le maintien du concours entre la première et la deuxième année du Master, même si les maquettes des futurs Masters devraient s’efforcer de privilégier la formation « intégrée » (entre théorie et pratique) plutôt que le modèle français traditionnel de la formation « consécutive » (théorie et disciplines avant le concours, formation pratique in situ après). A suivre...
Universities & Territories On the site http://www.universites-territoires.fr/ the No. 92 Universities & Territories is available. By Olivier Rey Service Manager Monitoring and Analysis of the French Institute of Education (ITIs). Some pointers to understand the reform of teacher training (page 21-22 of No. 92 Universities & Territories). More...
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