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Formation Continue du Supérieur
3 février 2013

Changements dans les entreprises et accès des seniors à la formation continue

Par Nathalie Greenan, Mathieu Narcy, Stéphane Robin. Changements dans les entreprises et accès des seniors à la formation continue: une comparaison entre les années 1990 et 2000. L’article examine si la dynamique des contextes professionnels dans l’industrie est associée à des profils spécifiques de formation selon l’âge. On observe, au cours des années 1990, un déficit de formation à l’informatique pour les ouvriers et employés de 50-59 ans dans les entreprises ayant un usage avancé des technologies de l’information et de la communication (TIC), déficit qui n’est plus visible pendant la décennie suivante où l’on identifie en revanche un moindre accès des seniors à la formation à la tâche principale. Ces résultats invitent à réfléchir aux besoins spécifiques en formation, face aux changements du travail, des salariés ayant accumulé plus d’expérience. Télécharger le Document de travail n°163.
INTRODUCTION

En Europe, tout comme dans le contexte national, l’apprentissage tout au long de la vie est vu à la fois comme un moteur potentiel de la croissance dans une économie fondée sur le savoir dont la main-d’oeuvre vieillit et comme un élément essentiel de la sécurisation de trajectoires professionnelles qui devraient se rallonger. Diverses évolutions contribueraient à rendre les compétences obsolètes de plus en plus rapidement, qu’elles soient reliées au capital humain général ou spécifiques au contexte de l’entreprise. Les technologies, et notamment les technologies de l’information et de la communication (TIC), se renouvelleraient à un rythme rapide autour de nouveaux usages sans cesse adaptés par les communautés d’utilisateurs; les préférences des consommateurs seraient plus volatiles dans une économie où les échanges se mondialisent. En réponse à ces évolutions, les entreprises chercheraient des structures organisationnelles plus flexibles et adapteraient le contenu de leurs emplois. Le maintien de l’employabilité implique donc de continuer à investir dans le capital humain tout au long de la trajectoire professionnelle.
Si l’on ne connaît que peu de choses sur les liens entre la dynamique de l’entreprise et ses pratiques de formation, on constate, d’une part, une très grande disparité d’accès à la formation continue selon les situations professionnelles (Lainé, 2003) et, d’autre part, un profil d’accès qui décroît régulièrement avec l’âge. Les résultats de l’enquête Formation continue de 2006, réalisée par le Céreq et l’Insee, montrent un taux de formation sur les douze derniers mois qui passe de 51% pour les moins de 30 ans à 36% pour les 50-59 ans et à 28% pour les 60 ans et plus (Fournier, 2006). Cet article a pour objectif d’éclairer la façon dont les changements mis en oeuvre par les entreprises contribuent à expliquer le profil d’accès à la formation continue selon l’âge. Les seniors sont-ils pénalisés dans leur accès à la formation lorsque le contexte technologique et organisationnel de leur activité professionnelle est fortement dynamique?
Dans notre approche empirique, nous allons comparer deux décennies différentes: les années 1990 et les années 2000. D’une décennie à l’autre, les grandes orientations du progrès technologique se sont infléchies et les politiques publiques dans les domaines de la formation et de l’emploi des seniors ont évolué. Nous allons caler notre analyse sur les résultats obtenus par Behaghel et Greenan (2010) à partir de l’enquête Changements organisationnels et informatisation (COI) de 1997 et répliquer ces résultats avec l’édition de 2006 de cette enquête à des fins de comparaison. Ce faisant, nous éclairerons les apports d’un dispositif d’enquêtes couplées employeurs/salariés à l’analyse d’une question qui intéresse particulièrement les politiques publiques du vieillissement actif.
L’article s’organise autour de six sections. La première présente le cadre théorique ainsi que les évolutions entre les années 1990 et 2000. La seconde décrit le dispositif couplé COI. La troisième retrace les résultats obtenus à partir de COI 1997 sur les pratiques de formation des entreprises et fournit quelques statistiques descriptives sur 1997 et 2006. La quatrième expose la méthodologie poursuivie: la stratégie d’identification et le modèle économétrique. La cinquième présente et discute les résultats. Une dernière section conclut...
7. CONCLUSION

Entre 1997 et 2006, les paramètres centraux des arbitrages des employeurs et des salariés pour investir dans la formation continue en présence de chocs de productivité semblent avoir changé. En effet, il n’existe plus, en 2006, d’effets différenciés de l’âge sur la probabilité de bénéficier de formations à l’informatique selon l’usage avancé des TIC ou le recours intense aux NPO. En revanche, il apparaît en 2006 que l’âge constitue toujours un critère d’attribution de formations à la tâche principale.
Plus particulièrement, deux désavantages constituaient le coeur du constat dressé en 1997: (1) un désavantage comparatif global dans l’accès aux formations à l’informatique des seniors qualifiés lorsque les indicateurs d’usage des NPO et des TIC étaient à leur point moyen et (2) un désavantage des seniors non qualifiés lorsque les entreprises avaient un usage avancé des TIC. Ces désavantages ne s’observent plus en 2006. Cette évolution observée chez les seniors peut sans doute s’expliquer par un phénomène générationnel. En 2006, les 50-59 ans correspondent à une génération de dix ans plus jeune que cette même tranche d’âge en 1997. Il s’agit donc d’une génération de salariés plus sensibilisée à l’usage de l’informatique, et de ce fait plus facile à former à ses applications en entreprise. Les entreprises industrielles ayant un usage avancé des TIC forment plus en 2006 leurs ouvriers et employés jeunes, l’écart avec les autres entreprises s’élevant à environ quatorze points de pourcentage.
Concernant la formation à la tâche principale, plusieurs phénomènes non observés en 1997 apparaissent en 2006. Tout d’abord, les ouvriers et employés les plus âgés sont moins formés à leur tâche principale que les plus jeunes lorsque les indicateurs d’usage des NPO et des TIC sont à leur point moyen. Ensuite, les entreprises ayant un usage avancé des TIC forment significativement moins leurs employés et ouvriers âgés de 40 à 49 ans mais davantage leurs cadres et professions intermédiaires appartenant à cette même classe d’âge qui sont, en revanche, moins formés quand les entreprises ont un usage intensif des NPO. Contrairement aux résultats concernant les formations à l’informatique, certains résultats concernant les formations à la tâche principale sont sensibles à nos deux formes de contrôle de l’hétérogénéité non observée, ce qui suggère que, durant la période récente, les salariés âgés les plus productifs sont ceux qui se sont le mieux maintenus en emploi.
Ainsi, les nouveaux éléments de 2006 qu’il conviendrait de creuser dans la perspective de l’apprentissage tout au long de la vie se situent plus du côté des formations à la tâche principale que du côté des formations à l’informatique. L’analyse de l’enquête COI a montré que les changements les plus intenses qui ont caractérisé la dynamique des entreprises au cours de la période récente concernent l’usage des outils informatiques. Par ailleurs, les outils informatiques qui se sont diffusés au tournant du millénaire changent plus profondément les manières de faire son travail que les outils de la décennie antérieure. Si l’informatique s’est banalisée, son omniprésence s’est traduite par son incorporation croissante dans les différentes facettes de l’activité. Les enjeux de formation associés à ces mutations récentes ne sont pas tant de faciliter l’accès à l’outil informatique que d’accompagner les transformations dans les manières de travailler qu’elle suscite. Les chances d’accès plus faibles aux formations à la tâche principale des ouvriers et employés âgés de plus de 50 ans, lorsque les indicateurs d’usage des NPO et des TIC sont à leur point moyen (-29,7 points de pourcentage), des ouvriers et employés âgés de plus de 40-49 ans dans les entreprises avec un usage avancé des TIC (-9,5 points de pourcentage) et des cadres et professions intermédiaires de 40-49 ans dans les entreprises avec un recours intense aux NPO (-5,8 points de pourcentage) sont à ce titre préoccupantes.
À l’heure où la formation professionnelle est de plus en plus considérée comme un élément central de la compétitivité des entreprises et de l’employabilité des salariés, il convient de bien identifier où se trouvent les besoins de formation et quels sont les freins possibles au développement de celle-ci. Cette contribution éclaire deux aspects importants. D’une part, nos résultats en 2006 soulignent des besoins accrus de formation à la tâche principale dans les contextes de changement et un possible manque d’adéquation des formations reçues. Dès lors, il conviendrait de réfléchir à la façon dont la formation professionnelle pourrait accompagner les changements dans les manières de travailler que ces mutations génèrent. Une présence de responsables des ressources humaines le plus en amont possible des projets de changement des entreprises serait certainement utile pour anticiper leurs implications concrètes sur le contenu du travail. D’autre part, nous avons identifié un moindre accès à la formation à la tâche principale pour les salariés âgés de plus de 40 ou 50 ans, selon les cas, dans les contextes professionnels dynamiques. Cela invite à réfléchir aux spécificités des besoins en formation face aux changements du travail des salariés ayant accumulé plus d’expérience. Les recherches des ergonomes montrent notamment que les seniors ont des besoins spécifiques, comme des durées de formation plus longues, susceptibles de renchérir le coût de leur formation. Ces éléments sont à prendre en compte dans la conception des politiques de soutien à la formation professionnelle... Télécharger Changements dans les entreprises et accès des seniors à la formation continue: une comparaison entre les années 1990 et 2000.

By Nathalie Greenan, Mathieu Narcy, Stéphane Robin. Changes in business and access to senior training: a comparison between 1990 and 2000. This article examines whether the dynamics of professional backgrounds in the industry is associated with profiles specific training age. Observed during the 1990s, a lack of computer training for workers and employees aged 50-59 in firms with advanced use of information technology and communication (ICT) deficit is no longer visible in the decade following, where we identify however less access to training seniors to the main task. These results invite to consider specific training needs, to changes in the work, employees have accumulated more experience. More...

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