Droit à la formation initiale différée - Contribution de Jean-Marie Filloque
Proposition 24. Encourager les établissements à développer le nombre des formations en alternance et par apprentissage, en formation initiale ou tout au long de la vie.
27. Développer la possibilité de doctorat en formation continue ou en alternance.
25. Faciliter la validation des acquis de l’expérience, simplifier et accélérer les procédures, diminuer les coûts selon les certifications visées.
26. Encourager le retour en formation et la formation tout au long de la vie en général en renforçant les financements de formation continue et en adaptant les rythmes et les méthodes d’enseignement aux salariés”.
Une proposition mériterait d’être précisée: “26. Encourager la reprise d’études pour les bacheliers professionnels ou technologiques qui ont déjà eu une première expérience professionnelle”. Signifie-t-elle qu’il faut dissuader, empêcher une partie des bacheliers professionnels de poursuivre immédiatement des études après le baccalauréat? Sélection à l’entrée de l’université: mot tabou jamais mentionné dans les 121 propositions des Assises (sauf pour la première année des études de santé).
Dommage, vraiment dommage que le comité de pilotage des Assises n’ait pas pris en compte les propositions de Jean-Marie Filloque, vice-président Formation Tout au long de la Vie, en charge du CEVU de l’université de Bretagne Occidentale (Brest), ancien président du réseau national de la Formation Continue Universitaire. Je partage totalement ses analyses, ses argumentations et ses propositions (chronique: "alarme pour les bacs pros". Lire la contribution de Jean-Marie Filloque pour les Assises (photo du 28 novembre 2012).
Au cœur de ses propositions.“Créer un droit à la formation initiale différée. Cette proposition permettrait de limiter l’effet “couperet” de l’orientation post-bac (ou au moins souvent vécue comme telle tant par les jeunes que par leur parents) et de renforcer l’orientation raisonnée ou raisonnable. Elle renforcerait a posteriori l’égalité des chances… Elle permettrait d’offrir aux jeunes indécis, ou en difficulté scolaire, une garantie de pouvoir revenir utiliser leur compte formation, après une période de travail ou de toute autre expérience plus ou moins longue, pour lesquels une mobilisation systématique des dispositifs de validation des acquis serait assurée”…
“En 2010-2011, 69.800 personnes ont repris une formation diplômante à l’université. Pour plus de la moitié (39.000), les coûts pédagogiques étaient financés directement par les fonds de la formation professionnelle dans le cadre de conventions ou de contrats de formation (OPCA, plan de formation d’entreprise, Pôle emploi, fonds régionaux…). L’autre moitié (30.800) est financée sur le budget de MESR, et son coût évalué dans le PLF 2013 de la formation professionnelle à 626 M€”…
La contribution de Jean-Marie Filloque pour les Assises
Assises nationales de l’ESR, 13 Novembre 2012, Contribution de Jean-Marie FILLOQUE, Vice Président FTLV en charge du CEVU de l’université de Bretagne Occidentale (Brest), Ancien président du réseau national de la FCU.
« Faire de l’apprentissage tout au long de la vie un outils de l’ESR » et « Agir pour la réussite de tous les étudiants»
Les assises de l’ESR offrent une occasion de présenter deux propositions qui semblent rarement être mises en perspective de la réussite pour tous et qui impliquent en partie une transformation du paysage de l’ESR français. Je propose dans cette contribution une vision issue de ma propre expérience d’une part d’enseignant-chercheur et d’autre part d’acteur de la formation tout au long de la vie universitaire tant en France que dans des réseaux internationaux. Elle n’engage pas mon université même si la fonction que j’y occupe n’est pas sans rapport avec ces propos.
La première proposition est revenue récemment sur le devant de la scène avec le sommet social de juillet 2012 et le rapport sur le « Pacte pour la compétitivité de l’industrie française » de Louis Gallois publié en novembre 2012. Il s’agit de ce qu’aujourd’hui on appelle « le compte individuel de formation » et que l’ANI (Accord National Interprofessionnel qui porte ici sur la Formation professionnelle continue) de 2009 avait appelé « la formation initiale différée ».
La seconde concerne plus spécifiquement l’optimisation possible des parcours des étudiants dans l’immédiat post-bac, alors que se construit une part de leur devenir professionnel. Ma proposition s’appuie sur des métiers du travail social ou du secteur para-médical mais pourrait être étendue à d’autres secteurs.
Ces deux questions sont partiellement complémentaires et l’avis ici formulé implique bien des changements tant dans le monde parfois clos de l’éducation traditionnelle: l’enseignement supérieur et la recherche centrée sur ses disciplines, que dans celui de la formation professionnelle liée à d’autres ministères et depuis les lois de décentralisation de 1994, aux régions.
1. De l’orientation raisonnée...
Confrontés à la question de l’orientation et à l’injonction de l’insertion professionnelle, les jeunes, éventuels futurs étudiants, ne sont pas tous égaux. Le déterminisme socio-culturel et géographique dans le devenir des futurs citoyens de ce pays a longuement été analysé, débattu et parfois combattu. C’est ainsi qu’en 2012, « avancer vers la réussite pour tous les étudiants » est l’un des trois thèmes majeurs retenu pour ces assises. Une vision extensive de la formation tout au long de la vie peut ouvrir de nouveaux horizons à condition de reconnaître à l’enseignement supérieur, et particulièrement aux universités, un rôle légitime dans la formation professionnelle. La loi de 1971 a créé une obligation nationale que Raymond Vatier (cité dans la thèse de Jacques Denantes « les freins à l’engagement des universités dans la formation continue » Université Paris X Nanterre, Juin 2005) relayera en 1972 en précisant dans une circulaire destinée aux établissements que « au delà de l’apport initial de l’école, la formation continue permet à l’homme de continuer à évoluer et l’aide à maîtriser les situations diverses qu’il rencontre dans sa vie (familiale, civique, professionnelle,...) »... Appliquée par les universités, les dispositifs successifs ont ouvert la possibilité aux adultes de reprendre leurs études pour préparer un diplôme supérieur ou une réorientation professionnelle dans de bonnes conditions: Formation de qualité, maintien d’un salaire, temps de formation suffisant (dispositifs du CIF (Congé Individuel de Formation), PICS (Programme Ingénieurs Cadres supérieurs), Objectif Cadre, Chèques formation des régions...),...
Financés soit par des fonds mutualisés de la formation professionnelle, soit par des dispositifs publics spécifiques, ces réponses à des demandes individuelles sont devenues progressivement plus difficiles à mobiliser et ont pratiquement disparu. L’ANI de 2009 propose que soit rendu possible la « Formation Initiale Différée » en l’inscrivant dans un principe d’équité et en limitant la portée et la durée: « Dans un souci d'équité, les salariés, qui ont arrêté leur formation initiale avant le premier cycle de l’enseignement supérieur... devraient avoir accès à une ou des formation(s) qualifiante(s) ou diplômante(s) d’une durée totale maximale d’un an, mise(s) en oeuvre notamment dans le cadre du congé individuel de formation.» Si la loi de novembre 2009 portant sur l‘Orientation et la Formation Tout au Long de la Vie n’a pas repris cette proposition, de plus en plus de voix s’élèvent pour la remettre en avant sous un autre nom. Dans le dernier rapport de Louis Gallois sur la compétitivité pour la France la16ème proposition: « demander aux partenaires sociaux de négocier les modalités de mise en oeuvre d’un compte individuel de formation, « crédité » soit au début de la vie active, soit chaque année, et attaché non au statut, mais à la personne. » en est l’une des déclinaisons.
La proposition que je mets en avant est de mettre en place une offre généralisée de formation différée en direction des jeunes, mobilisable facilement et à tout moment et dimensionnée en fonction des budgets mobilisés au niveau de l’enseignement supérieur. Cette proposition permettrait de limiter l’effet « couperet » de l’orientation post-bac (ou au moins souvent vécue comme telle tant par les jeunes que par leur parents) et de renforcer ce que j’appelle l’orientation raisonnée ou raisonnable. Elle renforcerait a posteriori l’égalité des chances. En 2010-2011, 69800 personnes ont repris une formation diplômante à l’université.
Pour plus de la moitié (39 000), les coûts pédagogiques étaient financés directement par les fonds de la formation professionnelle dans le cadre de conventions ou de contrats de formation (OPCA, plan de formation d’entreprise, Pôle emploi, fonds régionaux...). L’autre (moitié 30 800) est financée sur le budget de MESR, et son coût évalué dans le PLF 2013 de la formation professionnelle à 626 M€. La France ayant choisi d’ouvrir l’ensemble des diplômes du supérieur aux adultes (approche intégrative que je défend), l’extension de cette modalité dans le cadre rénové de la formation initiale différée est d’ores et déjà pratiquement opérationnelle, sans être suffisamment connue ni comprise. Par contre son financement, son inclusion dans les processus d’orientation et progressivement dans la « culture » des établissements comme de notre société peut requérir un effort particulier. Elle impose de travailler de manière décloisonnée, au delà des frontières entre initial et continu, monde de l’éducation, de la formation, et monde du travail, supérieur/second degré, formation professionnelle et formation « académique »... Cela peut être l’un des enjeux de ces assises et des prochaines réformes qui devraient intégrer les volets formation et activité personnelle et professionnelle tout au long de la vie.
Le nouveau dispositif permettrait d’offrir aux jeunes indécis, ou en difficulté scolaire, une garantie de pouvoir revenir utiliser leur compte formation, après une période de travail ou de toute autre expérience plus ou moins longue, pour lesquels une mobilisation systématique des dispositifs de validation des acquis serait assurée.
L’un des corolaires de cette proposition est la nécessité d’une éducation à l’apprentissage tout au long de la vie, pour faire évoluer la vision que notre société a de la réussite. Par ailleurs, modifiant de manière durable la sociologie et le profil des « usagers » de l’enseignement supérieur, la mise en oeuvre de cette proposition impliquerait aussi une réelle évolution de la pédagogie universitaire, des rapports de l’Université avec la société mais
aussi des indicateurs d’évaluation.
Synthèse de la proposition 1 :
‐ Inclure l’éducation à l’apprentissage tout au long de la vie dans les objectifs de l’enseignement pré-universitaire et lancer des campagnes de communication sur le thème
‐ Créer un droit à la formation initiale différée et poser ses modalités de gestion (financement, mise en oeuvre...) dans le cadre d’une négociation multipartite (Etat, Régions, Universités, partenaires sociaux, organisation étudiantes, lycéennes...)
‐ Modifier la première mission des universités: de « Formation initiale et continue » à « formation tout au long de la vie » et les évaluer sur leur capacité à l’inclure dans leur stratégie
2. ...à l’orientation optimisée.
Toutes les études montrent que moins les jeunes sont diplômés, plus leur difficulté d’accès l’emploi est importante. Ne pas stigmatiser les jeunes qui ne poursuivent pas immédiatement des études supérieures et les inscrire dans un parcours de réussite est l’ambition de la première proposition. La deuxième proposition se concentre sur l’articulation spécifique à la France entre diplômes et accès à l’emploi dans certains secteurs. Les plus emblématiques sont sans doute les secteurs du travail social et celui des métiers du paramédical. Ces deux secteurs ont en commun de disposer d’un système d’accès à l’emploi basé sur la possession d’un diplôme d’état (DE) délivré essentiellement à l’issu de formations professionnelles organisées au sein d’écoles spécialisées, recrutant après un concours plus ou moins sélectif. Ces écoles peuvent être publiques ou privées et leur financement est régulé et assuré par des fonds décentralisés en région.
Ces deux secteurs sont actuellement animés de mouvements de fond, portant en particulier sur la question de l’inscription de leurs certifications dans le cadre européen (EQF) et plus spécifiquement dans le cadre du processus de Bologne, sur leur positionnement comparatif dans le LMD.
La stratégie du secteur para-médical, poussé par des mouvements sociaux sectoriels, a été d’opter pour la reconnaissance progressive de grade (Licence, Master) pour chaque diplôme. Le premier à conduire au grade de licence est le DE infirmier, dont les premiers « gradés » sont sortis en Juin 2012. D’autres conduiront au grade de Master comme pour les infirmiers anesthésistes en 2014. Si le positionnement des diplômes a été au coeur des discussions pour ce secteur, à ma connaissance, aucun travail n’a été mené sur l’accès à ces formations et leur articulation avec les parcours antérieurs des candidats qui, de plus en plus souvent ont une première expérience dans l’enseignement supérieur. Dans le même temps, une fois diplômés, de plus en plus de ces professionnels se retournent vers l’université, parfois via une procédure de validation des acquis, pour accéder à un master leur ouvrant la porte à de nouvelles responsabilités ou fonctions.
La stratégie adoptée dans le secteur du travail social sur la question des certifications est différente et n’en est pas au même point d’avancement. Le choix opéré par la structure fédérant aujourd’hui les organismes de formation du secteur a été de commencer par la quantification en ECTS des diplômes délivrés, ouvrant la possibilité de comparaison dans le système LMD par une autre voie que celle du cadre de qualification. Dans le même temps un groupe de travail national a entrepris d’évaluer les articulations existantes et souhaitables avec les universités et de faire des propositions aux ministères pour ces formations. Ses conclusions seront rendues publiques prochainement mais la question du positionnement par rapport aux grades L, M et D se posera nécessairement, y compris dans le lien avec la recherche.
Entrés dans l’emploi après l’obtention de ces diplômes d’état, il est normal que ces professionnels se posent la question du maintien de leurs compétences mais surtout, et de plus en plus, de leur évolution professionnelle. C’est ainsi qu’émergent les demandes de validation d’acquis permettant par exemple l’accès à un master, puis un doctorat, ou à ces diplômes parfois construits entre écoles du travail social et universités comme le DEIS. La question de la reprise d’études et de la co-construction de parcours est ancienne et impose de poser la question de la professionnalisation par la formation à l’université.
Pour ces deux secteurs, la démarche est différente mais vise le même objectif, articuler des systèmes parallèles menant à des certifications professionnelles avec les grades universitaires. L’enjeu pour ces DE est la lisibilité dans l’offre de formation/certification, l’attractivité, vitale pour de bons professionnels mais aussi l’évolution possible tout au long de la vie. Ils ont en commun de relever depuis les lois de décentralisation, de la compétence des régions pour le fonctionnement des écoles. Ils ont aussi en commun d’imposer pour l’accès à l’emploi le passage par des diplômes d’état préparé dans des structures dédiées, publiques ou privées recrutant sur concours. Une grande partie des candidats à ces concours qui requièrent pour la plupart un baccalauréat ou un équivalent, les prépare soit dans cycles préparatoires spécifiques soit en parallèle avec un parcours universitaire ou/et un emploi.
Ma conviction personnelle est que l’université pourrait être en capacité de préparer l’ensemble des diplômes professionnels, à l’image de la médecine, en collaboration étroite avec les parties prenantes professionnelles. Il faut partir de la situation actuelle et entamer le lent processus de rapprochement nécessaire pour à la fois optimiser les parcours de formation et aussi en diminuer le coût global pour la société. La reconnaissance et la valorisation des acquis des personnes souhaitant acquérir les diplômes d’état doivent être rendues obligatoires. Cette valorisation peut prendre la forme de transfert de crédits ECTS dans le cas de parcours commencé dans une autre institution comme l’université. Des expériences ou des propositions existent déjà pour les filières paramédicales. L’évolution envisagée pour la PACES en est un exemple. Rendre progressive l’orientation sur les 3 premières années, inclues dans un véritable parcours de licence, à la fois universitaire et professionnalisante, permettrait cette perméabilité et ce gain de temps pour les candidats. Ma proposition plaide pour une généralisation de cette approche qui aurait, par ailleurs, l’avantage de renforcer la nécessaire coopération entre « académique » et « professionnel » et de renvoyer aux motivations qui ont conduit à la mise en oeuvre des missions de formation continue dans les établissements supérieurs au début des années 1970. L’entrée de la formation continue dans les missions de l’université avait suscité bien des débats en 1971, et sans doute qu’une partie des arguments portés par les Ministres d’alors, et incitant les universitaires à prendre en compte la loi « Delors » reste d’actualité dans notre nouveau contexte. En 1972, Olivier GUICHARD déclarait: «…dans le contexte de cette sorte de marché, les établissements d’enseignement supérieur doivent accepter le principe du renouvellement radical de leurs habitudes, de leurs structures, de leurs méthodes et du contenu de certains de leurs enseignements… » et Joseph FONTANET en 1973 ajoutait: « La mise en oeuvre de la loi no 71-575 du 16 juillet 1971 [...] nécessite un profond effort d'adaptation de l'ensemble du système éducatif à ces nouveaux publics. »
Synthèse de la proposition 2 :
‐ à court terme, permettre au niveau régional ou infra une expérimentation pluri-annuelle entre organismes de formation du travail social et/ou paramédicaux et les universités pour une reconnaissance mutuelle des acquis formels (cartographie des résultats d’apprentissage et transfert de crédits pour les parties validées)
‐ à moyen terme, revoir l’architecture des dispositifs de formation pour intégrer les formations professionnelles dans des structures universitaires reconnues sur la base de conventions multipartites. Télécharger La contribution de Jean-Marie Filloque pour les Assises.
Proposition 24. Encourage institutions to increase the number of alternating training and apprenticeship, training or throughout life.
27. Develop the ability to doctoral training or alternating.
25. Facilitate the validation of acquired experience, simplify and accelerate procedures, reduce costs covered by certifications.
26. Encourage the return to education and training throughout life in general by increasing funding for training and adapting the rhythms and teaching employees. "
A proposal should be made clearer: "26. Encourage the resumption of studies for graduates or professionals in technology that have already had a first experience." Does it mean that we must deter, prevent some of the graduates pursue professional studies immediately after the bachelor? Selection for admission to the university: taboo word never mentioned in the Assize of 121 proposals (except for the first year of health studies).
Too bad, too bad the steering committee of Assisi did not take into account the proposals of Jean-Marie Filloque, Vice President Training Throughout Life, in charge of CEVU University of Western Brittany (Brest ), former president of the National Network of University Continuing Education. I fully share its analyzes, arguments and proposals (chronic alarm bins pros. Read the contribution of Jean-Marie Filloque for Assizes (photo 28 November 2012). More...