La formation des chômeurs en Europe
Par Paul Santelmann, Responsable de la Prospective à l’AFPA. La formation des chômeurs est-elle appréhendée de la même façon dans les pays de l’Union Européenne? En croisant les différentes études sur ce domaine on mesure l’importance des traditions et des cultures nationales et locales et la difficulté de transposition de tel ou tel modèle national vers un autre pays (pays étudiés: Autriche, Pays-Bas, Suède, Danemark, Grande Bretagne, Belgique, Allemagne.[Données issues notamment du CEDEFOP, du CEREQ. D’autres contributions ont été utilisées comme les articles de Christèle Meilland sur la formation au Danemark (Chroniques internationales de l’IRES n° 133 – novembre 2011 et n° 101 – juillet 2006)]).Globalement tous les pays disposent de mécanismes permettant aux individus d’accéder aux savoirs, de poursuivre ou de reprendre ses études. Mais aucun pays n’a complètement résolu les questions liées aux tensions entre l’effort de formation et le fonctionnement du marché du travail. Par ailleurs, la comparaison entre les politiques de formation continue des différents pays se heurte à l’absence de données financières précises dans les études disponibles. Les éléments financiers sont généraux et ne permettent pas de cerner l’économie spécifique, les modes de financement et les seuils de rentabilité de l’activité de formation des moins qualifiés.
L’implication volontaire des entreprises dans la formation de leurs salariés les moins qualifiés est un deuxième gage d’efficacité de la formation des chômeurs. Que ce soit en Autriche, en Grande Bretagne ou aux Pays Bas, pays de tradition différente, quand les employeurs constatent la valeur ajoutée des formations sur leurs salariés, ils ont un préjugé favorable à l’égard des formations des chômeurs notamment quand ils sont partie prenante de celles-ci.
L’engagement des communes ou des pouvoirs locaux dans les dispositifs dédiés aux moins qualifiés est un troisième élément d’efficacité de ceux-ci. Les collectivités locales semblent plus comptables de l’harmonie entre le tissu économique local et les politiques sociales que les Etats centraux. Dans de nombreux pays les pouvoirs régionaux ont des compétences autonomes leur permettant d’innover et de compléter les dispositions nationales de droit commun. En Grande Bretagne, l’Ecosse ou le Pays de Galles german-labour-ministerdéveloppent des démarches spécifiques en matière de formation.
L’implication locale des représentants des entreprises et des salariés dans la définition des contenus de formation et le contrôle de la qualité des organismes de formation, semble être un gage d’efficacité des systèmes de formation des adultes.
La diversité (associatif, public et privé) de l’appareil de formation semble être un élément fort de l’adaptation de l’offre de formation aux différents objectifs de la formation post-scolaire. Cette diversité tient aux vocations complémentaires des différents réseaux qui ne tendent pas à occuper les mêmes créneaux en termes de finalités. Pour autant les organismes de formation des pays les plus avancés ne sont pas spécialisés par statut de public (il n’y a guère d’opérateurs dédiés aux seuls chômeurs).
L’efficacité des systèmes de formation des adultes tient dans l’équilibre des finalités de la formation des adultes. Dans les pays les plus avancés, on n’oppose pas les formations BRITAIN-CAMERON/WELFAREpromotionnelles qui répondent à des candidatures volontaires de personnes souhaitant évoluer professionnellement aux formations « courtes» de retour à l’emploi des chômeurs. Les prestations en direction des chômeurs peu qualifiés relèvent plus du développement des compétences-clef ou transverses (comportemental, relationnel, savoirs de base, etc.) que de contenus techniques liés à tel ou tel métier. Les formations professionnelles qualifiantes et/ou d’adaptation à l’emploi sont réalisées majoritairement par les entreprises elles-mêmes.
Le Danemark semble avoir le système le plus élaboré avec les centres AMU (Arbejdsmarkedsuddannelserne) qui développent des programmes dits de formation du marché du travail qui relèvent du ministère du Travail. Les enseignements sont essentiellement techniques. Les comités sectoriels locaux (organisations syndicales et patronales) déterminent les objectifs de qualification et le contenu des cours. Les formations sont ouvertes aux travailleurs semi-qualifiés et qualifiés, aux AMUtechniciens et personnels d’encadrement, ainsi qu’aux chômeurs. Pour les salariés, les formations sont dispensées pendant les heures de travail et souvent par modules. Le financement est assuré par le ministère du Travail ainsi que par les entreprises et les salariés. La généralisation du principe des modules vise à concilier les objectifs de court terme (adaptation rapide à des emplois) et de long terme (élévation du niveau général de qualification).
Mais la principale leçon de ce tour d’horizon c’est qu’il n’y a pas de dispositifs miraculeux de formation des chômeurs sans des dynamiques d’acteurs locaux efficaces et des organismes de formation de qualité…