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Formation Continue du Supérieur
9 août 2012

Le mécénat, un sujet que les Assises de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur doivent prendre en compte

https://sites.google.com/site/institutffres/_/rsrc/1325847759788/config/iffres.jpgAuteur : Max Anghilante avec la contribution de Marie-Blandine Prieur. Source : Matinale IFFRES du 17 juillet 2012. Moins de 10% du mécénat et des dons individuels vont vers l’enseignement supérieur et la recherche, soit pour le mécénat d’entreprise une enveloppe de l’ordre de 200 M€. La faiblesse de ce montant s’explique probablement par le fait que pour l’entreprise comme pour le citoyen, ces domaines sont d’ordre régalien et relèvent de l’Etat et donc ne légitime pas une générosité particulière.
Ces 200 M€ sont à mettre en perspective, d’un côté, l’Etat, avec les dépenses intérieures de l’éducation nationale (23,7 Mds €), le budget de la recherche publique (7,4 Mds €), d’un autre côté, les entreprises, avec les dépenses en R&D des entreprises qui atteint 24 Mds soit plus de 100 fois le montant du mécénat, le Crédit Impôt Recherche (2,1 Mds €) ou encore les dépenses en formation continue (11,2 Mds €).
Selon Jean-Louis Lacombe, Vice Président de l’IFFRES et ancien VP d’EADS, lors de la Matinale IFFRES du 17 juillet sur le rôle et la place des incitations fiscales dans le mécénat, «les entreprises sont des caméléons de la société civile. Elles font du mécénat essentiellement pour des aspects de communication, interne ou externe, et donc choisissent des thèmes qui utilisent la même grille de valeur que les particuliers, à savoir: la santé, la solidarité, l’humanitaire, puis la culture, le sport, l’écologie et la politique. Pour elles comme pour les citoyens, la recherche et l’enseignement supérieur restent du ressort de l’Etat.»
En matière de communication l’entreprise peut d’ailleurs aussi bien faire du sponsoring qui relève d’avantage de sa culture « marchande ».
En ce qui concerne la Recherche, l’entreprise se tournera plus naturellement vers le Crédit Impôt Recherche qui est, en ce domaine, la principale incitation fiscale dont elles peuvent bénéficier et qui présentent trois avantages majeurs par rapport au mécénat:
- L’entreprise conserve l’entière maîtrise de son projet de recherche;
- L’entreprise est propriétaire des résultats et détient les droits de propriété intellectuelle;
- Le CIR est fiscalement au moins aussi avantageux que le mécénat.
En revanche, pour l’enseignement supérieur, il n’y a guère d’autre alternative au financement privé « volontaire » que le mécénat. La Taxe d’Apprentissage que versent les entreprises par définition n’a rien de volontaire, sauf dans le choix des établissements auxquels l’entreprise souhaite la verser.
Pour compléter ce tableau, rappelons que depuis 2004, les fondations et structures assimilées dédiées à la recherche et l’enseignement supérieur foisonnent. De l’ordre de 300 en 2008, tous statuts confondus, elles sont passées en 2012 à près de 700 parmi lesquelles une quarantaine de fondations « universitaires » mais surtout 228 fonds de dotation. Comme le précise Jean-Louis Lacombe « nous n’avons pas vu les financements privés, dons et mécénat, suivre la même évolution ». Pour illustrer ce propos, Max Anghilante, Président de l’IFFRES, relève que « sur ces 228 fonds de dotation, seuls 7 ont été créés par des mécènes (deux par des particuliers et 5 par des entreprises), les autres disposent pour la plupart de fonds initiaux très limités et sont à la recherche de ressources pour financer leurs missions».
Dans cette perspective, il est nécessaire de mesurer l’impact que pourrait avoir une remise en question des incitations fiscales pour le mécénat. Qui devraient être considérées plutôt comme des encouragements à un investissement privé en faveur de la recherche et l’enseignement supérieur pour lequel aucun retour n’est attendu que comme des « niches fiscales », point de vue de Bercy.
Le risque est grand que ne soit remise en cause, la relation « non marchande » entre le monde académique de la recherche et de l’enseignement supérieur et le monde socioéconomique. Celle-ci se construit depuis peu sur la base de l’intérêt général et nécessite pour produire tous ses effets, constance et durée car il s’agit avant tout d’acculturation réciproque.
Pour Gilles Gleyze, Directeur du développement de l’Ecole Centrale de Paris, « il ne faut pas oublier que le mécénat coûte toujours plus cher que de ne rien donner et que dans la culture française où la philanthropie pour la recherche et l’enseignement supérieur demeure une notion assez nouvelle, l’incitation fiscale a un effet déclencheur tant sur l’acte de donner que sur les montants. Le repli de l’avantage fiscal aboutirait sans doute à un reflux de la dynamique de mécénat. Il convient donc de procéder avec prudence. »
Selon Max Anghilante, « pour nombre de nos interlocuteurs, l’incertitude induite par l’annonce d’une remise en question des avantages fiscaux du mécénat, dans un contexte de crise économique, se traduit dès à présent par une frilosité perceptible des entreprises à s’engager. »
Il est vital, à ce stade que les acteurs du mécénat, entreprises et bénéficiaires, clarifient leur compréhension de ce qu’est le mécénat et de ce à quoi ils s’engagent. Selon Karim Maatoug, Chargé de mission à la Mission du mécénat au Ministère de la Culture et de la Communication, « trop souvent les entreprises n’ont qu’une compréhension limitée du sens du mécénat et de l’intérêt général. Elles les confondent avec le sponsoring. Cela conduit à des dérives, notamment en matière de dépassement des contreparties attendues dont la tolérance est fixée par Bercy à 25% du montant du don pour l’entreprise, uniquement sous la forme de communication ».
Or comme le constate Gilles Gleyze, « nous avons changé de dimension avec des niveaux de dons de l’ordre du ou des millions grâce à un déplafonnement de l’engagement de l’entreprise. Cela change profondément le regard en interne et le regard de l’entreprise, d’entrer dans le débat sur le mécénat sans contrepartie est un vrai changement dans la politique de l’entreprise.»
Pour empêcher les abus, constatés par la Cour des Comptes, il faut mieux réglementer et contrôler le cadre juridique et fiscal du mécénat. C’est pourquoi le Ministère de la Culture travaille sur l’élaboration d’une charte éthique du mécénat. Dans la perspective de sauver la loi Aillagon, préserver le mécénat et ses retombées économiques, Karim Maatoug, du Ministère de la Culture, espère que les autres ministères concernés se joindront à eux pour conduire une réflexion commune.
Cette démarche, d’une plus grande « moralisation » et rigueur en matière de mécénat, est soutenu par de nombreux acteurs tels le Centre Français des Fondations ou encore Admical.
L’IFFRES a de son côté, à la suite de la loi dite du médicament et de ses retombées inattendues dans les relations entre les entreprises et les organismes à but non lucratif du secteur de la santé, lancé il y a plusieurs mois un think tank dont l’objectif est l’élaboration d’une charte du mécénat et du partenariat dans la recherche et l’enseignement supérieur. Les premiers résultats devraient être communiqués lors du prochain colloque IFFRES en novembre 2012.
Intervenant à la Matinale IFFRES du 17 juillet, Jacques Fontanille, Conseiller au cabinet de Madame Geneviève Fioraso, Ministre de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur, a fait savoir que les fondations de recherche et de l’enseignement supérieur étaient un sujet sensible. « Quoiqu’elles ne soient pas visées particulièrement par les Assises de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur que vient de lancer le ministère, elles en font partie puisqu’elles sont porteuses de projets issus notamment de la LRU (fondations universitaires et partenariales) ou du Plan Investissements d’Avenir (Fondations de coopération scientifique). »
Il n’est pas rare qu’un chercheur soit à la fois impliqué dans un Labex, un Equipex, une FCS tout en étant rattaché à une université et un centre de recherche. Et que ce même chercheur passe son temps à rédiger, tour à tour pour chacune de ces entités, des demandes de financement public ou privé, au détriment de ses travaux de recherche.
Les dix dernières années ont vu en effet, des réformes et des programmes s’empiler et s’imbriquer: LMD, LME, LRU, Plan Campus, Investissements d’Avenir… et les structures se démultiplier. Il est temps d’en faire l’inventaire, de recueillir des propositions et d’aménager l’existant. Tels sont, au travers d’un débat au niveau des territoires et au niveau national, les objectifs des Assises qui s’achèveront en décembre 2012 dans la perspective d’une loi d’orientation pour fin 2013.
Trois thèmes principaux seront traités:
- La réussite des étudiants avant, pendant et après leurs études sous tous ses aspects: pédagogie, logement, aide sociale, insertion professionnelle…
- La réorganisation afin d’assurer un plus grand équilibre entre le niveau national et le niveau territorial, revitaliser la recherche fondamentale et permettre aux chercheurs de se concentrer sur leurs travaux;
- Les territoires, qui par exemple, devraient être plus impliqués dans la gouvernance des établissements en leur qualité de partenaires de plus en plus fréquemment sollicités. Tout comme il est attendu une meilleure articulation des relations entre les établissements, les territoires et les entreprises.
Selon Jacques Fontanille, « le mécénat ne sera donc pas oublié des Assises et le ministère invite à faire les contributions utiles sur ce sujet. »
Par ailleurs, le ministère envisage d’établir une cartographie des fondations dans la recherche et l’enseignement supérieur.
Mettre les étudiants au coeur des Assises est de bon augure. En matière de mécénat, ils sont trop souvent négligés dans les projets proposés par les fondations et établissements d’enseignement supérieur que ce soit en qualité de bénéficiaire ou d’acteur.
En France, le mécénat des individus est effectivement récent et complémentaire du mécénat à gros impact de l’entreprise qui se voit rapidement. Ainsi pour les alumni de plus en plus sollicités, il ne s’agit pas de financer du fonctionnement mais des projets d’avenir, des projets plus long terme comme par exemple un nouveau bâtiment, ou de faire preuve de solidarité envers leurs jeunes camarades.
Il est crucial aussi, pour conduire une vrai démarche de mécénat, de trouver un équilibre entre l’intérêt du chercheur et celui de l’entreprise et d’assurer une véritable transparence au niveau de la gouvernance qui doit savoir et pouvoir justifier de la bonne utilisation des fonds qui lui sont confiés.
«Il faut à la fois que s’opère un gros changement culturel», rappelle Jean-Hervé Lorenzi, Président du Cercle des Economistes, « et préserver l’indépendance de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur.» Les habitudes universitaires n’ont pas tellement changé et la tendance ne s’y est pas encore imposée d’encourager la diversité, d’agir de concert, de partager, de confronter les points de vue et de s’ouvrir. « On ne saurait limiter le mécénat d’entreprise au seul financement des chaires par exemple ». Il convient « de faire du développement de la recherche et de l’enseignement supérieur un outil pour notre développement économique » et pour cela « jouer sur notre plus bel atout: la diversité ».
Renforcer les pôles d’excellence, certes, mais pas au détriment de la diversité de nos savoirs et expertises. Tout comme il est indispensable de favoriser les liens entre recherche et enseignement supérieur et PME et d’encourager ces dernières à innover.
Le mécénat pourrait donc jouer un rôle d’impulsion en matière d’innovation et pour faire émerger de nouvelles pistes de « collaboration » privé-public.
Pour tous ces points et bien d’autres, on retiendra que le mécénat est un sujet qui relève des ambitions des Assises de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur. L’IFFRES entend apporter sa contribution aux débats.

https://sites.google.com/site/institutffres/_/rsrc/1325847759788/config/iffres.jpg Author: Max Anghilante with the work of Marie-Blandine Prieur. Source: IFFRES Morning of July 17, 2012. Less than 10% of sponsorship and individual donations go toward higher education and research, whether for a corporate sponsorship budget of around € 200m.The weakness of this amount is probably explained by the fact that for the company as for the citizen, these areas are of a sovereign state and are therefore not legitimate and not a particular generosity. More...

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