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Formation Continue du Supérieur
19 mars 2012

La segmentation actuelle du marché du travail est-elle soluble dans la flexicurité

http://www.cereq.fr/var/plain_site/storage/images/publications/net.doc/la-segmentation-actuelle-du-marche-du-travail-est-elle-soluble-dans-la-flexicurite/37057-1-fre-FR/La-segmentation-actuelle-du-marche-du-travail-est-elle-soluble-dans-la-flexicurite_large.pngPar Philippe Lemistre. Net.Doc n° 88. La flexicurité, au coeur des injonctions européennes, est présentée comme porteuse de nombreux avantages. Elle est censée limiter le chômage, aider à la croissance et diminuer la segmentation du marché du travail. Quels sont ses bienfaits en période de crise? Quels sont ses effets, en France, sur la segmentation du marché du travail?
Une synthèse d'études empiriques permet de dresser un état des lieux des évolutions en cours de la segmentation du marché du travail. Il apparaît notamment les marchés internes sont toujours présents, et que l’inscription des individus dans le marché externe est de moins en moins temporaire, la segmentation entre emplois rejoignant à long terme celles entre individus. Télécharger la publication.
Extraits

Au coeur des « innovations » économiques et sociales en Europe, la flexicurité occupe toujours une place importante comme socle de réformes destinées à limiter le chômage et obtenir d’avantage de croissance, tout améliorant les transitions professionnelles. La flexibilité externe de la main d’oeuvre, soit des possibilités de mobilités accrues entre entreprises, est ici l’élément moteur de l’efficacité économique du marché du travail. Cette représentation prévaut, par exemple, pour les politiques actuelles imposées à la Grèce où l’assouplissement des règles sur le marché du travail est censé rendre au pays sa compétitivité à moyen terme.
Il nous semble donc opportun de réexaminer les bienfaits supposés de la flexicurité en période de crise. La flexicurité est donc censée apporter un cadre idéal à la concurrence croissante et exacerbée sur le marché des biens et services. En effet, l’adaptabilité aux transformations et aux fluctuations des marchés - liées notamment aux crises conjoncturelles - semble passer par une mobilité accrue de la main d’oeuvre entre les entreprises, soit une augmentation de la flexibilité externe. Tous les salariés se trouveraient alors sur un marché ou les transitions professionnelles sont fréquentes. L’objectif de la flexicurité est de sécuriser ces nouvelles trajectoires supposées communes à tous dans un avenir proche. Un accroissement et une gestion « optimum » de la flexibilité externe permettraient alors des gains de compétitivité susceptibles de résorber le chômage et d’augmenter la croissance.
Or, actuellement, la réalité du marché du travail en France est plutôt sa segmentation a minima entre des individus « à carrières » et des individus en situation précaire (chômage ou/et emploi temporaire). Cette segmentation doit donc être supprimée pour converger vers un modèle conforme aux présupposés précédents. Ainsi, il ressort des différents textes de l’Union européenne que l’objectif de la flexicurité serait d’éviter la segmentation du marché du travail en organisant les mobilités interentreprises afin de répondre à un besoin supposé accru de flexibilité externe. Les moyens envisagés sont la réduction de la législation protectrice de l’emploi et le développement des politiques actives du marché du travail. Ces objectifs européens sont opérationnalisés par un travail de sensibilisation des Etats pour développer leurs actions. Par exemple, le Livre Vert de 2006 lance le débat public vers la réforme des législations du travail, avec pour finalité la création d’emploi, dont serait garante la flexicurité. Plus récemment, la Commission européenne précise dans ses « lignes directrices intégrées pour la croissance et l’emploi » que les Etats membres doivent « promouvoir la flexibilité en même temps que la sécurité d’emploi, et réduire la segmentation du marché du travail » (ligne directrice numéro 21).
Les différents Etats membres se sont évidemment saisis de ces injonctions européennes de façons très différenciées. En période de crise, on peut s’interroger alors sur le rôle de la flexicurité « à l’européenne » sur la structuration du marché du travail en France. En clair, les traductions nationales de l’injonction européenne de flexicurité sont-elles susceptibles d’organiser un vaste marché du travail promouvant la mobilité entre entreprises ouvert à tous ou, à l’inverse, ne risquent-elles pas d’étendre le champ potentiel du marché externe, au sens de la précarité et de l’absence de carrière, soit finalement d’augmenter plutôt que de réduire la segmentation, voire de « l’institutionnaliser »?
Dans ce domaine, les politiques publiques menées indépendamment des attendus de la flexicurité, politiques de réduction du temps de travail et de l’allègement du coût du travail, semblent à elles seules avoir déjà contribué au renforcement des frontières entre segments du marché du travail (Gazier et Petit, 2007).
Nous tenterons dans cet article d’examiner in fine, l’effet potentiel des prémices de la mise en oeuvre de la flexicurité en France sur le devenir de la segmentation. Avant ce dernier développement, l’essentiel de l’article tentera d’établir un état des lieux des évolutions en cours de la segmentation du marché du travail, en regard de la dichotomie marchés internes versus marché externe. L’approche micro économique retenue est complémentaire à celle plus « structurelle » des évolutions de la segmentation.
En effet, il ne s’agit pas d’identifier les populations des différents sous-segments du marché du travail et de participer au débat du courant institutionnaliste qui tente de redonner corps aux théories de la segmentation tout en déplorant, à juste titre, la relative pauvreté des études empiriques qui permettraient de mieux identifier les différents segments et leurs composantes. Une synthèse récente a été faite dans ce domaine (Michon et Petit, 2007).
Nous retenons donc une définition à la fois très générale et très restrictive des marchés internes qui englobe leur genèse via le courant institutionnaliste et leur réappropriation, plus ou moins convaincante, par la théorie néoclassique. Rappelons que pour les institutionnalistes au sein des marchés internes, les salaires ne se fixent pas selon les lois « habituelles » (ajustement selon le niveau de l’offre et de la demande d’emploi). Un marché interne se définit comme une unité administrative, un établissement industriel, par exemple, à l’intérieur duquel la rémunération et l’allocation du travail sont régies par des procédures administratives (Doeringer P. et Piore M., 1971).
Depuis les travaux de Doeringer et Piore, les économistes ont tenté de préciser les « procédures administratives » décrites par les deux auteurs et les plus néoclassiques d’entre eux ont tenté de « rationaliser » ces modes de gestions de main d’oeuvre en les faisant entrer dans leur cadre d’analyse marchand. De nombreux modèles associés à des situations de travail particulières ont été proposés en s’appuyant essentiellement sur la théorie des incitations et du capital humain. Ils sont constitutifs d’un courant de l’économie néoclassique, personnel economics, dont les travaux ont été synthétisés par Lazear (1998).
Il est essentiel de signaler ce courant car ce sont ces modèles qui sont « testés », souvent indépendamment les uns des autres, dans la très grande majorité des études empiriques (économétriques) sur données individuelles (micro) qui entendent remettre en cause l’existence des marché internes, au sens « large » évoqué précédemment. La remise en cause des marchés internes est surtout invoquée, par le courant d’inspiration néoclassique, en regard d’un surplus salarial associé aux modes de gestions de main d’oeuvre appliqués aux salariés stables a priori en déclin. C’est principalement cette vision en termes de plus value des marchés internes que nous discuterons au sein du premier développement (section 1). L’objet principal de cette première section est d’interroger la réalité d’une remise en cause des marchés internes, souvent invoquée, en examinant l’évolution des modes de gestion de main d’oeuvre et à partir d’études reposant sur des données individuelles longitudinales.
Relativiser la remise en cause des marchés internes suppose a fortiori l’existence a minima d’un marché externe, voire de plusieurs segments alternatifs, dont les « marchés professionnels » où les salariés bénéficient d’une stabilité des trajectoires individuelles en changeant fréquemment d’entreprise tout en restant dans le même champ professionnel (Germe, 2001).
La seconde section discute succinctement ces alternatives et surtout interroge l’hypothèse du développement d’un marché externe constitué d’un segment « précaires » auquel s’ajoute un segment « exclusion » ou plutôt « inemployables » (Castel, 2009). Il s’agit notamment d’expliciter en quoi le marché externe est de plus en plus une affaire d’individus, alors qu’il était auparavant plutôt associé à des emplois. En clair, l’inscription des individus dans le marché externe est de moins en moins temporaire, la segmentation entre emplois rejoignant celles entre individus à long terme. L’approche segmentationniste rejoint alors les problématiques des inégalités (Michon, 2007).
Cet état des lieux sera confronté dans le dernier développement (section 3) aux différentes approches de la flexicurité, cette dernière étant censé « abattre » les frontières entre segments du marché du travail, voire promouvoir un marché unique de la mobilité pour tous avec une sécurité des trajectoires individuelles renforcée.
CONCLUSION

En conclusion, faut-il « jeter le bébé flexicurité avec l’eau du bain »? En aucun cas! En effet, mobiliser des corps intermédiaires plus ou moins sous la houlette de l’Etat pour mieux organiser les transitions entre emplois: pourquoi pas? Donc oui aux marchés transitionnels. Mais dès lors que l’on admet, d’une part, que les marchés internes sont et seront toujours présents car indéniablement efficaces sur le plan économique, et d’autre part que le marché externe devient de plus en plus affaire d’individus, alors les marchés transitionnels ne sont que pour quelques uns, du moins dans leur configuration institutionnelle actuelle.
Pour rendre leur « capabilités » à mobiliser de nouvelles ressources ou des compétences existantes et donc leur employabilité à une frange importante de la population active, seul l’Etat peut intervenir au titre de l’Etat social tel que formulé par Robert Castel (op.cit.). Toutefois, au même titre que certains ignorent la segmentation qui se met en oeuvre sans représenter un modèle de transitions avant l’avènement d’hypothétiques marchés transitionnels pour tous, Robert Castel surdétermine la précarisation de la population active. Une voie médiane reste à tracer où l’Etat doit avoir une place centrale pour accompagner des politiques publiques favorables à la sécurisation des trajectoires des individus, politique fondée sur des objectifs de long terme. En effet, la principale raison qui pousse les entreprises à souhaiter plus de flexibilité externe, c’est de répondre aux contraintes de coût à court terme, conséquences d’une financiarisation de l’économie qui exige une rentabilité forte dans toutes les circonstances. Mais l’argument brandit par l’Europe et par les tenants de la flexicurité, quel que soit leur obédience théorique, n’est pas celui-ci, c’est celui de l’efficacité économique à long terme de la flexibilité externe. C’est cet argument que nous mettons fortement en doute, constatant le maintien des marchés internes, les évolutions de l’individualisation des rémunérations et trouvant même des arguments de théorie micro économiques globalement plutôt favorables aux marchés internes.
L’Etat doit donc rester le garant du bien être à long terme qui ne passe pas nécessairement par l’argument de flexibilité externe. Comment favoriser l’insertion sur le marché du travail des réputés inemployables, sécuriser les précaires du marché externe (qui finalement est plutôt une nouveauté)? Là encore la perspective pourrait bien reposer sur le long terme en France, puisqu’elle passe par une évolution intrinsèque des syndicats et aussi et surtout par des relais efficaces de l’Etat sur les territoires pour mettre en oeuvre cette politique. Si l’on considère en France que ces relais sont les nouvelles agences du Pôle emploi, alors il faut totalement revoir les objectifs de cette institution qui reste tournée vers l’intermédiation au profit des employables, ceci avec des objectifs chiffrés en termes de placement qui s’articulent mal avec un suivi individuel à moyen terme.
Télécharger la publication. Voir aussi Etudier en licence: parcours et insertion, La professionnalisation des formations dans l’enseignement supérieur, The role of speciality in vocational training, L’enseignement supérieur et les marchés du travail.

Ved Philippe Lemistre. Net.Doc nr. 88. Flexicurity i hjertet af europæiske påbud, bliver præsenteret som støtter mange fordele. Det er meningen at begrænse arbejdsløsheden, væksten og bidrage til at reducere segmenteringen af arbejdsmarkedet. Hvad er dens fordele i krisetider? Hvad er dens virkninger i Frankrig, på segmentering af arbejdsmarkedet?
En syntese af empiriske undersøgelser giver os mulighed for at udarbejde en opgørelse over den aktuelle udvikling på arbejdsmarkedet segmentering. Det ser ud til især de indenlandske markeder er stadig til stede, og at inddragelse af personer i det eksterne marked er stadig mindre midlertidig opdeling mellem varige arbejdspladser forbinder dem mellem individer. Download publikationen.
Uddrag
I hjertet af "innovationer" i den økonomiske og sociale Europa, der stadig flexicurity indtager en vigtig plads som grundlag for reformer for at dæmme op for arbejdsløshed og at opnå vækst fordel, og samtidig forbedre faglige overgange. Ekstern fleksibilitet af arbejdskraft, eller øgede muligheder for mobilitet mellem virksomheder, her er den drivende kraft i den økonomiske effektivitet af arbejdsmarkedet
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