
Aujourd’hui le risque est que ce cadre européen soit abordé selon des considérations académiques (hiérarchie des savoirs) mettant en exergue les différences entre pays en matière de conception de l’enseignement supérieur. Le débat porterait donc sur le contenu des niveaux 7 et 8 alors qu’on assisterait à une nouvelle fragmentation des niveaux de base… Ainsi les niveaux 1, 2, 3 et 4 présupposent une accentuation des discriminations à l’intérieur des catégories ouvrier et employé comme le souligne une étude récente : « Ainsi par exemple, certains CAP formant à des métiers d’art artisanaux pourraient être considérés comme préparant à plus d’autonomie sur la dimension « compétence » du CEC que d’autres CAP industriels. »[1]. Dans ce cas de figure la nouvelle nomenclature contribuera non pas à promouvoir les CAP artisanaux mais à déclasser les CAP industriels !
Certes le niveau infra V serait « reconnu » comme le niveau 1 de la nouvelle nomenclature mais avec des effets désastreux en termes d’image (la notion floue de « non qualifiés » serait ainsi objectivée par un niveau de certification minimum dont on ne voit guère à quoi il correspondrait pour les entreprises). De la même façon que le BAC PRO est venu réduire les zones d’insertion d’une partie des titulaires de CAP, la segmentation en 8 niveaux peut mécaniquement créer des certifications infra-V non reliées à des activités professionnelles… L’usage de la VAE serait même déstabilisé pour les moins qualifiés qui se verraient attribuer un niveau officiel dans la nomenclature.
Il est donc urgent d’introduire dans les réflexions sur l’usage du CEC des éléments d’objectivation des compétences tirées de l’analyse des activités professionnelles et des mobilités professionnelles (dimensions transférables des compétences) plutôt que de s’engager dans l’impasse de la hiérarchie académique des savoirs.
Voir aussi l'article du blog "la quadrature des niveaux français et européens de formation".